«Ce sera un événement historique, la victoire de tout un peuple face à l’immoralité et à la décadence de ces derniers temps », a-t-il lancé à ses partisans lors de son dernier meeting de campagne dans l’emblématique stade Azteca de Mexico. A 64 ans, Andrés Manuel Lopez Obrador, « AMLO », comme le surnomment les Mexicains, se présentait comme le candidat anti-système et anti-corruption, voulant chasser « la mafia du pouvoir ». Après deux précédents échecs, il était cette fois crédité de plus de 20 points d’avance dans les sondages sur ses adversaires des partis traditionnels.

Un tournant

Derrière lui, le jeune conservateur Ricardo Anaya vantait sa « modernité » à la tête d’une coalition de droite et de gauche (formée par le PAN, le PRD et le Movimiento Ciudadano). Il devançait José Antonio Meade, du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, droite), un indépendant choisi par le parti au pouvoir, qui figure en troisième position. « Nous avons testé le PRI et le PAN et c’était un désastre, le moment est venu de changer, c’est l’heure du Morena (Movimiento Regeneración Nacional/Mouvement de régénérescence nationale, NDLR) », le parti de Lopez Obrador, juge Carlos Miguel Salinas, un instructeur d’éducation physique de 26 ans.

Lopez Obrador a su capitaliser sur le ras-le-bol des Mexicains après le mandat de Peña Nieto marqué par la corruption et des violations des droits de l’homme.

Si les pronostics se confirment, les élections d’hier pourraient marquer un tournant dans la vie politique mexicaine.

« Ce qui est sûr, c’est que le système des partis traditionnels s’est vu ébranlé par la poussée du Morena », analyse Duncan Wood, directeur de l’Institut du Mexique au Centre Woodrow Wilson.

La lutte contre la violence et la corruption a été au cœur des discours d’AMLO. L’ancien maire de Mexico (2000-2005) a promis de faire reculer la pauvreté qui alimente les cartels et de combattre la corruption pour financer des programmes sociaux. Il a proposé un « gouvernement austère, sans luxe ni privilèges », qui réduira de jusqu’à 50 % les salaires des hauts fonctionnaires, y compris le sien.

Renégocier l’Aléna

De nombreux Mexicains critiquaient cependant son manque de propositions concrètes, et sa rhétorique « populiste », craignant qu’il n’entraîne le pays sur la voie du Venezuela. Beaucoup s’interrogeaient aussi sur sa future relation avec le président Trump alors que des dossiers cruciaux sont sur la table, tels que la crise migratoire ou la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (Aléna).

En plus du mandat présidentiel, les quelque 89 millions d’électeurs devaient renouveler plus de 18 000 mandats, dont les sièges de 500 députés et de 128 sénateurs, ainsi que des postes régionaux ou locaux. La campagne électorale aura été « la plus sanglante » de l’histoire du Mexique, avec au moins 136 assassinats d’hommes politiques.