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  • © 2016 AFP | Crée le 18.07.2016 à 00h45 | Mis à jour le 18.07.2016 à 00h50
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    Vue d'un immeuble, le 1er juillet 2016, du quartier de Firminy construit par Le Corbusier dans les années 50, près de Saint-Etienne (Loire)

    La France fut le principal lieu d'expression de Le Corbusier. Dix sites viennent d'y être inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco, avec sept autres à l'étranger. Des utopies urbaines toujours vivantes et toujours clivantes.

    Lorsqu'on parle de l'architecte, il y a les anti, farouchement anti ; et les pro, farouchement pro. Son esthétique en béton brut, monumentale et dépouillée, ne laisse pas indifférent. Beaucoup soulignent aussi l'échec du projet collectif de "cités verticales", des "barres" dont on ne cessera d'essayer de se défaire depuis.

    "Il faut se replacer dans le contexte de l'époque. Il était d'une avant-garde incroyable dans les années 30 alors qu'il n'existait pas de grue et les techniques de construction étaient arriérées. Ou après-guerre, face aux enjeux d'explosion démographique et d'insalubrité, quand il a fallu construire trois millions de logements en 30 ans", souligne Vanessa Fernandez, enseignante-chercheuse à l’École d'architecture de Paris-Belleville.

    L'idée de ce pionnier du Mouvement Moderne n'était pas de parquer le surplus démographique mais au contraire de remettre le bien-être au cœur de l'architecture.

    Avec ses constructions sur pilotis, ses grandes fenêtres en bandeau, ses duplex familiaux à double orientation avec cuisine ouverte (une révolution), il fait rentrer la lumière partout - aussi pour lutter contre la tuberculose. Les placards ne sont pas trop profonds, le plafond pas trop haut, les marches d'escalier adaptées à tous les membres de la famille.

    Pour ce faire, il crée une unité de mesure, le "Modulor", à l'échelle de l'homme. Pas n'importe lequel: "beau, sportif et mesurant 1m83", relève Vanessa Fernandez. Un homme idéal et standardisé: l'Aryen, selon les détracteurs de l'architecte, antisémite notoire et fasciste militant.

    - 'Éminemment moderne' -

    A Firminy (centre-est), son deuxième plus grand site après celui de Chandigarh en Inde, l'architecte réalise dès 1953 un vrai quartier, avec sa maison de la culture - héritage de son amitié avec Malraux-, son stade, sa piscine et son église. C'est l'idée d'un urbanisme capable de répondre aux besoins naturels et culturels de l'homme.

    "En ce sens, il est toujours éminemment moderne, il n'y a qu'à voir sur quels critères sont construits les éco-quartiers aujourd'hui ou les pavillons qui reprennent les pilotis, les fenêtres bandeau et les toits-terrasses", souligne Géraldine Dabrigeon, directrice conservatrice de Firminy-Vert.

    A Marseille, sa "Cité radieuse" a été rebaptisée "maison du fada". Beaucoup n'ont pas compris dans les années 50 pourquoi elle était de travers par rapport à l'axe principal: là encore, une histoire de lumière.

    Soixante ans plus tard, l'esprit de village vertical subsiste à Marseille, moins à Firminy où les murs passoires créent des conflits de voisinage dans cet immeuble où la majorité des 414 appartements sont des HLM.

    "A Marseille, c'est vrai qu'il y a une cohésion un peu plus importante" que dans les quatre autres unités d'habitation, reconnaît Jacques Delemont, président de l'association des habitants.

    Dans les "rues" - les couloirs - les enfants jouent ; l'école maternelle sur le toit-terrasse est toujours en activité ; un hôtel-restaurant, quelques commerçants et un lieu de création sur le toit, le MAMO, continuent de faire vivre ce paquebot de béton.

    Depuis que Marseille a été capitale européenne de la culture en 2013, la Cité radieuse est même devenue le troisième lieu le plus visité de la ville, après Notre-Dame-de-la-Garde et le MuCEM. Un patrimoine vivant, comme le souhaite l'Unesco, mais que les habitants ne veulent pas voir se transformer en zoo architectural.

    - Couvent et cabanon -

    Loin du tumulte marseillais, dans le Beaujolais, 12 frères dominicains vivent dans un temple de béton, de fer et d'acier entouré de collines et de forêt. C'est le couvent de la Tourette, à Eveux, réalisé en 1953 par Le Corbusier après une visite inspirante à l'abbaye cistercienne du Thoronet.

    "Il y a de l'austérité au premier regard mais ce dépouillement nous concentre vers l'essentiel", raconte le frère Marc Chaveau.

    C'est vrai que quand "vous n'allez pas bien, ce bâtiment n'apporte aucune consolation à part vous renvoyer à vous-même" mais "il nous forme le regard, il nous apprend à être attentifs aux fins jeux de lumière", ajoute le religieux, également historien de l'art.

    Là aussi le couvent est un lieu ouvert, qui accueille le curieux, même pour dormir.

    Ce tour de France pourrait se poursuivre à la Chapelle de Rondchamp (est) ou, plus près de Paris, à la villa Savoye de Poissy.

    Et se terminer au cabanon de Roquebrune-Cap-Martin, refuge de trappeur pensé avec le fonctionnalisme de l'architecte. "Un château sur la Côte-d'Azur, qui a 3,66 mètres par 3,66 mètres" comme le décrivait celui qui adorait passer ses vacances dans l'azur cru.

    Il y lâchera d'ailleurs son dernier souffle à 77 ans, en se noyant à quelques mètres de là en 1965.

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