La France doit mieux reconnaître les langues régionales d’outre-mer et renforcer leur enseignement dès le plus jeune âge, pour « une meilleure cohésion sociale », préconise le Conseil économique, social et environnemental. Le Cese réclame notamment l’adoption d’une loi constitutionnelle pour permettre de ratifier la « Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », signée en 1992, mais jamais signée par Paris. Cette ratification serait « un facteur essentiel de reconnaissance et de légitimation des cultures et des identités ultramarines, qui ne menace en rien l’unité nationale ».
Car historiquement, les langues régionales d’outre-mer « ont souffert d’un déni de réalité et de reconnaissance au sein de la République », qui a construit son unité autour de la langue française, note le Cese. Mais « il apparaît plus que jamais nécessaire de prendre conscience que l’enseignement des langues régionales n’est en aucun cas un obstacle à l’apprentissage ou à la maîtrise du français, bien au contraire », insiste l’avis, qui préconise que l’accueil des enfants à l’école élémentaire soit « systématiquement proposé en langue régionale, au même titre qu’en français, et pas seulement dans certains établissements ».
Le Cese s’inquiète aussi de la réforme du lycée et du baccalauréat, qui prévoit que le lycéen choisisse entre une langue vivante étrangère et une langue régionale, ce qui risque, selon lui, de conduire dans certains cas à la disparition de l’enseignement optionnel de langue et culture régionales.
Un colloque à Wallis
Il appelle le ministère de l’Education à créer « les budgets, les postes d’enseignants, les formations pour proposer systématiquement aux élèves un enseignement en langues régionales dans les outre-mer ».
Le Cese recommande aussi d’encourager « les pratiques de traduction, d’interprétation et d’accompagnement en langue régionale » dans les services publics, et de former les fonctionnaires, agents publics et personnels affectés ou détachés dans les outre-mer pour qu’ils aient « une meilleure approche des langues et cultures du territoire dans lequel ils exercent ». Certaines de ces mesures ont déjà fait l’objet de textes législatifs, « mais sur le terrain on est très loin des objectifs attendus » note le Cese.
Au mois de mars, Weniko Ihage, le président de l’Académie des langues kanak, avait demandé à Annick Girardin, la ministre des Outre-mer, d’organiser un colloque des langues régionales à Wallis en 2020, à l’occasion de l’inauguration de l’académie des langues de Wallis-et-Futuna.
Wallis et Futuna étaient les dernières îles françaises du Pacifique à créer leur académie. Des décennies après le paumotu, le marquisien, le tahitien ou les langues de Nouvelle-Calédonie. Weniko Ihage a demandé à la ministre d’apporter une attention particulière aux langues wallisienne et futunienne.
Créoles, langues amérindiennes, kanak, polynésiennes, les outre-mer comptent cinquante des soixante-quinze « langues de France ». Toutes sont des langues maternelles et usuelles de la population.