
Si les neuf antennes de l'Adie ont rouvert leurs portes mardi, ses permanences de terrain ne devraient, elles, reprendre que la semaine prochaine. Directrice adjointe de l'Adie Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna, Delphine Cottin a bon espoir que le retour en tribu soit plus aisé qu'en 2020. « Certaines de nos bénévoles nous disent que les déplacements sont plus libres. On pourrait revenir rapidement, avec l'accord des coutumiers. » Après le premier confinement, l'association qui accompagne 3 000 « clients » sur la Calédonie, dont 64 % en tribu, avait mis un mois avant de pouvoir rentrer dans certains endroits. « Cette réouverture est une très bonne nouvelle, mais elle ne doit pas occulter le fait que les entreprises ont connu une baisse d'activité pendant un mois. Les demandes d'aides sont difficiles d'accès pour les personnes en situation d'exclusion », précise la directrice adjointe de l'Adie, qui milite pour un accès facilité aux aides pour les entrepreneurs qu'elle accompagne (lire par ailleurs).
L'étude d'impact, que l'association vient tout juste de boucler, révèle que « quelques-uns de nos clients n'ont pas sollicité d'aides en 2020 car c'était trop compliqué. La bonne nouvelle, c'est que beaucoup ont réussi à survivre en se réorientant, comme les entrepreneurs du tourisme à l'île des Pins qui se sont tournés vers des activités traditionnelles de pêche ou d'agriculture ». Comme l'année dernière, les bénévoles de l'Adie ont gardé le lien par téléphone. « Nous avons appelé nos 3 000 clients pour connaître leur situation, leur proposer un accompagnement adapté, le report d'échéances et un prêt de relance pour ceux qui étaient le plus en difficulté. » Beaucoup d'entre eux n'ont en effet pas accès à Internet ou sont plus difficilement joignables en tribu, « comme celles du bord de mer à Hienghène ».
Intégralement utilisé « pour permettre à nos clients de se relancer », le fonds des prêts d'honneur de l'Adie a été réabondé par le ministère des Outre-mer. « Sans ça, nous n'aurions pas pu proposer des prêts à taux 0 cette année. » Si l'esprit entrepreneurial « est tout aussi fort malgré la crise », estime la directrice adjointe, créer son entreprise serait aussi devenu « une solution face au chômage, notamment chez les jeunes et les femmes des tribus qui ont du mal à trouver un emploi. » Chauffeur sur mine puis de bus, Marie-Rolande Joredie s'est lancée dans la couture lors du premier confinement. L'habitante de Canala connaît depuis le succès avec sa page Facebook « Xata création Xaracuu ». Accompagnée par l'Adie, et l'association Entrepreneurs kanak, qui lui a permis de monter une activité économique adaptée à son « statut de femme sur terrain coutumier », Marie-Rolande n'attendait qu'une chose depuis un mois : reprendre son activité, et surtout ses livraisons, à Canala comme à Nouméa. « Je ne pouvais pas livrer avec le confinement mais j'ai continué à créer, donc j'ai pu faire du stock », détaille la couturière, qui a lancé une gamme d'habits de mariage il y a peu. Elle travaille actuellement à l'organisation d'un défilé qui devrait se tenir en avril sur Canala, et ne compte pas s'arrêter là. « J'ai envie de m'agrandir et d'aller encore plus loin, je me donne un an pour y arriver. »
