
Jeudi après-midi, au Stade Pentecost sur la route de l'Anse-Vata, une petite quarantaine de jeunes, parmi lesquels une vingtaine de filles de l'AS Magenta, maillot blanc et doré sur le dos, ont chaussé leurs crampons. Sur le terrain, tous ont multiplié les séquences de jeu, les plaquages, les passes avec le désir de découvrir le rugby à XIII. Si certains connaissent déjà cette discipline, qui n'est pas gérée par la Fédération française de rugby, d'autres la découvrent pour la première fois. « Mon fils est extrêmement content, il va revenir demain », lance ainsi un père de famille sur le bord de la pelouse.
Sa progéniture, tout juste âgée de 14 ans, est davantage habituée au rugby à VII et à XV. Mais, profitant de la venue de l'Australien Dane Campbell et du Français Laurent Garnier, qui entraînent tous deux en Australie (lire repères), il a décidé de tenter l'aventure de cette variante de l'ovalie. Au moins le temps de ce stage d'initiation. Avant de succomber totalement au charme de cette discipline ? « Le meilleur moyen de découvrir le rugby à XIII, c'est de commencer jeune », glisse ainsi Manuel Jalabert, le président du club. « Si ça continue comme ça, dans deux ou trois ans, on pourra prétendre avoir des joueurs corrects », lance-t-il.
Il y a deux ans, alors que le projet était d'intégrer l'Intrust Super Cup en Australie (lire encadré), il misait pourtant sur des jeunes un peu plus expérimentés, entre 15 et 22 ans. « Avec ce public de jeunes seniors ou de juniors, quand il ne se passe rien, on le perd », glisse-t-il. Et, en pleine crise sanitaire, cela n'a pas manqué. D'une « quinzaine de joueurs au départ », Manuel Jalabert s'est peu à peu retrouvé avec « 10 personnes, puis 5, puis 2 » lors des rassemblements. « On s'est un peu pris un mur », confie aujourd'hui celui qui est également entraîneur des U16 et U19 au Crec car il « adore le rugby sous toutes ses formes ».
C'est pourquoi, l'unique club de rugby à XIII du territoire veut dorénavant « repartir de zéro ». Exit les rêves de haut niveau, du moins temporairement, place à la découverte. « L'objectif de ce stage est surtout de faire un repérage, de voir si des gars valent le coup et pourquoi pas les former en Australie afin de les exposer à un niveau de jeu supérieur », poursuit Manuel Jalabert. Et d'enchaîner : « On est au centre du Pacifique, on est au centre de toutes les plus grandes nations de rugby à VII, à XIII et à XV, je ne comprends pas pourquoi on ne joue pas à XIII aujourd'hui ».
Pour Laurent Garnier, ancien joueur professionnel aujourd'hui à la tête d'une équipe féminine à Brisbane, il faut dorénavant « s'amuser ». « Il y a de l'enthousiasme, c'est bien, mais il faut surtout avoir envie de revenir, c'est le plus important. Il ne faut pas être dans la technique, dans les projets de jeu, dans la compétition car ça serait pénible à écouter », dit-il, l'accent du sud toujours bien prononcé malgré son installation de longue date en Australie. Mais, en fin connaisseur, il garde un œil avisé sur certains jeunes, évoquant « quelques diamants purs ». Il faut maintenant les polir à force de travail et d'entraînements.

« On ne sait pas ce que va devenir le projet, mais la matière première est toujours là. » Que ce soit Manuel Jalabert, Laurent Garnier ou Dane Campbell, les sourires étaient présents sur les visages. Pourtant, l'ambition initiale de rejoindre l'Intrust Super Cup, également connue sous le nom de Queensland Cup, est un lointain souvenir. « Je ne peux rien présager, on va éviter d'envoyer la grosse artillerie comme la dernière fois. On était près à ce que des millions débarquent. Mais, maintenant, c'est step by step. On va relancer la machine petit à petit », explique ainsi Manuel Jalabert. Il y a deux ans, ce dernier rêvait pourtant d'intégrer l'Intrust Super Cup, également connue sous le nom de Queensland Cup (considérée comme la 2e division du rugby à XIII australien), en 2023. Un rêve qui s'est peu à peu envolé avec la Covid-19. Mais l'espoir est toujours présent alors que même la National Rugby League, l'élite du rugby à XIII australien, évolue. « Ils vont peut-être lancer un championnat réserve des clubs de NRL. Cela signifierait que les clubs de la Queensland Cup seraient relégués en 3e division. C'est un format qui existait en 1980. C'est dans les tuyaux, mais rien n'est sûr. Les choses bougent. Mais cela veut dire que l'on peut continuer », explique ainsi Laurent Garnier. Pour 2023, en revanche, la page est d'ores et déjà tournée.
L'Australien Dane Campbell, entraîneur au sein de l'équipe des North Queensland Toyota Cowboys, dont l'équipe première évolue en NRL (l'élite du rugby à XIII australien) et le Français Laurent Garnier, ancien international tricolore aujourd'hui entraîneur d'une équipe féminine au sein des Brisbane Tigers, sont arrivés cette semaine sur le Caillou. Un premier passage en Calédonie, qui s'est décidé au mois de mars. Avant d'autres allers-retours ?
Si trois entraînements ont déjà eu lieu, jeudi au stade Pentecost et à Païta et vendredi au stade Pentecost, les joueurs intéressés seront de nouveau mobilisés samedi matin. Ils ont de nouveau rendez-vous sur le terrain nouméen, de 8 heures à 11 heures, pour une ultime session d'entraînement.
Si Manuel Jalabert, le président de Pacifique Treize, a rempli son premier objectif en faisant venir Dane Campbell et Laurent Garnier sur le Caillou, il espère, d'ici la fin de l'année, organiser une rencontre avec l'équipe du Vanuatu. « Ce serait le premier match international », glisse-t-il.