Sur la carte Vulcain [1], une myriade de points rouges vient recouvrir une bonne partie de la Nouvelle-Calédonie. L’application développée par l’Œil (Observatoire de l’environnement) donne une idée de l’ampleur des incendies qui ont déjà frappé le pays cette année. Au 11 octobre, déjà pas moins de 378 départs de feu avaient été recensés depuis le 1er janvier, surtout dans la moitié nord du Caillou, pour une surface brûlée estimée à 11 689 hectares au total. Le phénomène s’est accéléré entre juin et juillet, avec plus de 250 départs pendant ces deux mois, soit environ 4 incendies par jour. Et ce n’est qu’un début.
Car si des pluies sont venues épargner le territoire ces dernières semaines, un nouvel épisode El Niño devrait toucher la Calédonie d’ici la fin de l’année et atteindre "un stade de forte intensité", selon Météo France. "Un temps plus sec que la normale est attendu. Il est d’ailleurs fort probable qu’il perdure jusqu’en fin d’année", indique le bulletin de prévision saisonnière. Un déficit de 35 % de précipitations est attendu jusqu’au mois de mars et un alizé stable et plus fréquent.
Pour Mauro Pizzolitto, président de l’Union des pompiers calédoniens, le pays vit d’ores et déjà les prémices d’une saison de feux de brousse qui s’annonce intense. "Ça a commencé à bien brûler dans le Nord, on repart sur les mêmes bases qu’il y a quatre ans." Les sapeurs-pompiers sont-ils parés ? "Nous sommes 650 pompiers volontaires et 190 pompiers professionnels, il faudrait qu’on soit trois fois plus", lâche Mauro Pizzolitto.
Un manque de moyens humains qui complique le travail des pompiers. C’est la province Nord qui souffre le plus de ces effectifs limités. "Il y a 150 pompiers volontaires et 20 pompiers professionnels dans le Nord pour une surface de 9 000 km2 à couvrir. Entre Pouébo, Kouaoua et Poya, il y a une zone d’environ 10 000 habitants où il n’y a pas de caserne."
Résultat, certaines unités peuvent faire jusqu’à quatre heures de route pour une intervention, "en prenant, en plus, le risque de dépouiller une caserne". Le territoire dispose de seulement 19 centres d’incendie pour 33 communes. Pour Mauro Pizzolitto, il est grand temps de "revoir le statut des pompiers en Calédonie", défini il y a bientôt trente ans. Une mise à jour qui permettrait de se pencher sur les rémunérations des pompiers volontaires, jugées trop faibles pour inciter à s’engager, mais aussi sur la gestion des centres d’incendie, aujourd’hui dédiée à des communes dont les moyens s’amenuisent d’année en année.
En attendant, les pompiers se préparent à faire face, en gardant l’espoir d’une météo clémente et d’épisodes pluvieux réguliers. Et en misant sur davantage de civisme et de responsabilités des Calédoniens. En marge des incendies qui ont ravagé l’île de Maui, à Hawaï, le gouvernement calédonien avait déjà averti la population : "Le gouvernement appelle donc les Calédoniens à redoubler de vigilance et à adopter une conduite responsable afin d’éviter de mettre en danger nos populations et notre biodiversité."