
Partout, des scènes de désolation et de chaos. Auteuil, Koutio, Dumbéa-sur-Mer, Apogoti, Takutéa… Dans la partie urbanisée de Dumbéa, presque rien n’a résisté aux émeutes. Depuis le déclenchement des violences, survenu dans la nuit de lundi 13 à mardi 14 mai, "les trois quarts des commerces ont été détruits" par l’action des pillages ou des incendies, estime, à la louche, Jean-Dominique Pinson, directeur de cabinet du maire de Dumbéa. Derniers en date : le Vival de Koutio et le restaurant du centre aquatique, incendiés dans la nuit de dimanche à lundi.
Au sein de l’exécutif municipal, on est conscients de la difficulté à dresser "un état des lieux précis". "Ça bouge en permanence", constate le directeur de cabinet. Sur les réseaux sociaux, les habitants s’informent en temps réel des meilleurs itinéraires pour rejoindre les différents quartiers. Mais force est de constater que la commune est en grande partie coupée du reste de l’agglomération. Par Auteuil ou la Savexpress, des barrages de militants empêchent en permanence de rejoindre la capitale. Les quelques opérations de libération des routes par les forces de l’ordre sont immédiatement suivies de l’installation de nouvelles carcasses de véhicules par les émeutiers. Les gendarmes "sont complètement dépassés", observe Jean-Dominique Pinçon.
Alors, un "sentiment d’abandon" s’installe chez les habitants. "Les Dumbéens se sentent complètement oubliés." Par manque de sécurisation, le ravitaillement n’arrive pas encore jusqu’aux commerces de Dumbéa, dont les rayons sont presque vides. "Trois choses vont poser problème : le manque de médicaments, de nourriture et la gestion des déchets." Après une semaine sans ramassage, des tas d’ordures commencent à se former le long de la chaussée. "On va rapidement tomber dans une crise de salubrité publique, s’inquiète le directeur de cabinet. Il va falloir gérer ça au plus vite, car dans une semaine on risque d’avoir des rats dans toutes les rues."
Des "crises dans la crise" que la commune a bien du mal à gérer. Au sein de l’hôtel de ville, dont une aile est condamnée à la suite d’un départ de feu vite maîtrisé, les effectifs présents essaient de faire face à la situation. "Mais on est clairement démunis à l’échelle communale. Et on ne veut pas non plus exposer les agents."
Alors, la municipalité mise sur la coopération entre voisins. Comme partout ailleurs, des groupes se sont constitués pour protéger les quartiers, à l’aide notamment de barrages filtrants qui ne laissent entrer que les résidents. "Le mot d’ordre, c’est de s’organiser entre quartiers. Il faut de l’entraide et de la solidarité", en particulier au niveau de la nourriture, poursuit Jean-Dominique Pinçon. La ville conseille de nommer des référents par secteur avec lesquels elle pourra travailler.
Seul moyen, selon le directeur de cabinet, de faire face à une situation qui risque de s’éterniser. "Il va falloir s’armer de calme et de patience. Il faut comprendre que ça va durer. On y arrivera, mais ça va prendre du temps."