
"C’est une très bonne chose, ça fait vraiment du bien moralement, on a tourné un peu partout dans les quartiers avant de trouver un endroit ouvert. On ne s’attendait pas à voir autant de commerces fermés." Sur la place des Cocotiers, les burgers que déguste cette famille, venue de Dumbéa-sur-Mer, "où c’est encore très tendu", ont rarement eu aussi bon goût.

Si la grande majorité des enseignes gardent le rideau baissé, une semaine après le début des émeutes, certains magasins commencent à rouvrir leurs portes au centre-ville de Nouméa. En particulier pour permettre aux habitants et à la poignée de travailleurs de pouvoir déjeuner le midi. À l’image de l’alimentation Stop 14 où les quelques barquettes préparées ont littéralement été prises d’assaut. "On a encore du mal à évaluer les quantités mais on s’ajuste au fil du temps en fonction des besoins, explique Antoine Pham, le gérant de ce magasin qui a réussi à faire venir depuis lundi six de ses neuf salariés. C’est important de pouvoir encore donner du travail à nos salariés et on dépanne bien les gens du quartier, même si on commence à ne plus avoir beaucoup de stocks et qu’on ne sait toujours pas quand nos fournisseurs pourront nous ravitailler."

Par mesure de sécurité, les enseignes n’accueillent les clients que jusqu’en début d’après-midi (vers 14-15 heures) afin de laisser les employés rentrer chez eux et pouvoir sereinement traverser les barrages. Sur les trottoirs quelques oriflammes font même leur retour, notamment au restaurant italien chez Titi, au Village, qui propose des pizzas à emporter. "Notre maître-mot, c’est de ne surtout pas augmenter nos prix comme on voit malheureusement dans certaines enseignes. On ne va pas assassiner les gens dans une pareille situation", glisse le gérant Titi, qui propose même du pain, le matin, pour "rendre service aux habitants du quartier". "Quand on voit les files d’attente un peu partout, cela permet d’aider les gens à notre niveau. Je regrette de ne pas pouvoir faire travailler mes équipes sur la partie restauration, mais être ici, ça aide à s’aérer l’esprit, à rencontrer et parler avec du monde."

C’est en partie pour cette raison que les quatre salariés de la boutique Ciga Verte voisine sont venus ce mardi, quand bien même, la clientèle ne se bouscule pas encore au portillon. "Nous sommes ouverts depuis dimanche et aujourd’hui, on voit quand même qu’il commence à y avoir plus de passage en ville. On sent que les gens ressortent un peu, soit par nécessité, soit par envie de ne plus être enfermés, estime Stéphane, le responsable de cette enseigne de vapotage. On a des clients ravis de retrouver leur boutique. Certes, on n’est pas dans l’alimentaire, mais des gens ont un réel besoin de se procurer du produit et d’avoir leur dose de nicotine, en particulier en cette période très stressante pour tout le monde. Ce matin, nous avons même eu une cliente qui a réussi à braver les barrages de Rivière-Salée qui est arrivée assez paniquée pour faire son plein et sans savoir si elle parviendrait à retourner chez elle."
