
Certains ont de bonnes adresses. Des habitudes quand ils viennent acheter une belle pièce de viande. Et ils n'hésitent pas à faire quelques kilomètres de plus. En route pour la boucherie Top Store, à Dumbéa Rivière, l'amateur de bœuf calédonien peut en plus admirer de belles bêtes bien grasses qui broutent tranquillement une herbe verte dans les prés longeant la route. " Le client qui vient jusque chez moi pour m'acheter de la viande, j'ai envie qu'il reparte avec le sourire ", raconte Christophe Hons, boucher depuis plus de trente ans et gérant de la boucherie Top store depuis dix ans. Christophe Hons fait partie de ces bouchers qui apprécient la viande calédonienne, respecte le travail des éleveurs et veut faire plaisir à ses clients.

Chaque semaine, il se rend dans les locaux de l'Ocef pour la vente aux enchères des carcasses Extra sélection. " Cela me permet de choisir mon bœuf et de le faire maturer pour qu'il soit plus tendre. La viande locale est très bonne, avec de beaux pâturages, une belle génétique… "
Le boucher de Dumbéa Rivière a tout résumé. La viande calédonienne est soutenue par les pouvoirs publics et encadrée par l'Ocef, Office de commercialisation et d'entreposage frigorifique, un établissement public industriel et commercial. De la logistique, comme déplacer les bêtes jusqu'à l'abattoir, à l'abattage, la découpe, l'entreposage, la vente aux bouchers, tout est géré par l'Ocef, qui apporte une régulation des prix, gère l'importation, et assure qualité et hygiène. La viande calédonienne est classée en fonction de sa qualité par l'IVNC, l'Interprofession viande de Nouvelle-Calédonie, de l'Extra sélection à la classe E. L'association IVNC regroupe les syndicats de tous les acteurs de la viande, que ce soient les éleveurs, les bouchers, ou les industriels, et bien sûr l'Ocef. Tous ces organismes sont gages de qualité de la viande. De nombreux autres facteurs nous assurent que, dans l'assiette, la viande locale n'a rien à envier à la viande importée.
Nos vaches, cochons, agneaux, moutons calédoniens sont des animaux sélectionnés. Ainsi, les limousines, choisies pour leur viande, peuvent être croisées avec des brahmanes, sélectionnées pour leurs aptitudes à résister au climat tropical et aux parasites, tels que la tique. Du côté des porcs, " les animaux élevés en Nouvelle-Calédonie possèdent des qualités génétiques au top pour la viande ", précise Samuel Prevost, directeur de l'IVNC. Les moutons également sont croisés et sélectionnés, comme les Dorper (à tête noire à la viande qualitative) croisés à une espèce résistante aux parasites. " Tous ces croisements sont gérés par l'UPRA, bovine, porcine... qui sélectionne, importe, teste. Mais nous nous basons sur les grands pays qui ont déjà beaucoup d'expériences. Certains éleveurs sont des sélectionneurs qui multiplient et sélectionnent les plus beaux animaux importés par l'Upra, continue le spécialiste. Tout cela contribue à assurer un renouvellement génétique, gage de qualité de la viande. " De plus, la Nouvelle-Calédonie bénéficie d'un statut sanitaire exceptionnel exempt de maladies. Cette situation limite drastiquement les pays importateurs, mais assure également une viande de qualité.
Bien sûr, les éleveurs sont pour beaucoup dans la qualité de la viande calédonienne. Déjà car les cheptels sont de petite taille. Les éleveurs sont donc proches de leurs bêtes, les connaissent, et effectuent un bon suivi de leurs animaux. Ces cheptels à taille humaine permettent un élevage extensif d'excellente qualité. " Les ruminants sont en pâturage toute l'année, sur de très grandes surfaces, commente Samuel Prevost. Le pâturage est travaillé par les éleveurs, amélioré, répondant ainsi aux besoins nutritifs des animaux, détaille le directeur de l'IVNC. En cas de sécheresse, des compléments alimentaires, produits localement avec en partie du maïs local, sont fournis aux bêtes. On ajoute à cela un terroir exceptionnel : l'ensoleillement, la proximité de la mer… "

" Les porcs calédoniens sont très majoritairement élevés en intérieur, mais nous sommes loin des élevages intensifs que l'on peut voir en Europe ", assure Samuel Prevost. De nouveau, la taille réduite des élevages calédoniens assure une proximité entre l'éleveur et ses animaux. " Une viande de bonne qualité est un animal élevé dans de bonnes conditions ", pose le directeur de l'IVNC.
L'association Interprofession viande de Nouvelle-Calédonie a deux missions essentielles : promouvoir la viande calédonienne et la classer. Il existe 9 catégories de viande bovine, de Extra sélection à E, l'Extra sélection étant la meilleure qualité de viande bouchère, et E réservée pour l'industrie de transformation. La classification est définie par un arrêté gouvernemental, prenant en considération divers critères : rondeur, engraissement, couleur, âge de la bête… Pour le porc, six catégories de viande existent, de Extra A à 3, définies sur la base de l'épaisseur de gras, de l'épaisseur de la longe, du taux de maigre des pièces…

Pour le bœuf, les carcasses classées en Extra sélection sont vendues aux enchères deux fois par semaine. Ainsi, les bouchers peuvent se rendre à l'Ocef et choisir leur carcasse. Les enchères sont reversées aux éleveurs. Ils peuvent ensuite laisser la carcasse saturée en chambre de maturation à l'Ocef. " Cela lui donne plus de tendreté, de flaveur…Une bonne viande se conserve et se bonifie au fil du temps ", explique Samuel Prevost. " Comme du bon vin ! ", estime Christophe Hors, le gérant de la boucherie Top Store. Sur le site de l'Ocef, une liste, mise à jour deux fois par semaine, permet de savoir quelle boucherie a acheté de la viande Extra sélection. Avec une carcasse Extra sélection, le boucher peut décrire la viande à ses clients. Cette catégorie assure une traçabilité importante : origine de la bête, âge, espèce, éleveur. " C'est une vraie mise en valeur du travail de l'éleveur, estime Christophe Hons, qui ajoute : il y a un troisième acteur pour avoir la meilleure viande, le consommateur. Il faut bien savoir faire cuire sa viande ! " Alors, à vos barbecues !

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