
"Je n’avais encore jamais vu un démarrage de soldes aussi calme. C’est très inquiétant." Derrière son comptoir, cette gérante d’une enseigne de prêt-à-porter féminin attend désespérément l’arrivée de clientes dans sa boutique. Lancés depuis samedi pour une période d’un mois, ces soldes n’attirent pas les foules dans les rues du centre-ville. Effondrement du pouvoir d’achat, peur du lendemain, départs du pays, instabilité politique… Le climat n’est clairement pas redevenu favorable pour les affaires. "Il y a beaucoup moins de monde qu’avant les émeutes. Je fais de belles remises jusqu’à -70 % donc j’espère qu’une fois la paye du mois tombée, il y aura un pic d’activité, poursuit cette cheffe d’entreprise, qui ne cache pas son pessimisme. Je m’attends à une année 2025 encore pire que 2024. Tout le monde est soucieux et a la tête ailleurs. Pourvu que cette visite ministérielle aboutisse à quelque chose. On a besoin d’une perspective, quelle qu’elle soit, pour sortir de cette période angoissante."
À quelques encablures, si le constat est un peu moins alarmiste, l’équipe de la Boîte à chaussures observe également une baisse de la fréquentation et des achats par rapport aux soldes d’été de l’an passé. "Depuis le 13 mai, on a quand même perdu beaucoup de clients qui avaient du pouvoir d’achat. Et les personnes qui ont les moyens et qu’on voit encore se limitent davantage. Elles font beaucoup plus attention, glisse Djoon. Ce n’est pas encore catastrophique en ce qui nous concerne, mais on n’a aucune perspective pour 2025 et on a encore beaucoup de stocks non écoulés de l’an dernier. On essaie donc d’adapter nos produits en commandant davantage ceux qui partent le plus et on fait d’emblée des grosses remises, ce qu’on ne faisait pas avant, pour inciter les clients à acheter."

Sans surprise, cette tendance "baissière" est confirmée par le Syndicat des commerçants de Nouvelle-Calédonie. "Le niveau de remises des soldes reflète bien l’état de santé de la profession. Si ces rabais sont d’emblée importants, c’est pour deux raisons : il y a encore beaucoup de stocks non écoulés et les commerçants ont un besoin de générer vite de la trésorerie, détaille Ronan Daly, à la tête du syndicat, qui recense aussi certaines enseignes qui misent sur d’importants déstockages en vue d’une fermeture définitive. Les soldes ont pris une saveur différente, puisqu’on est aujourd’hui dans une logique de survie économique. Et pour l’heure, nous n’avons aucun signal positif, si ce n’est cette reprise des discussions politiques. 2025 est l’année de toutes les incertitudes."
