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Enercal : 2024, une année "très atypique"
Anne-Claire Pophillat | Crée le 14.03.2025 à 05h00 | Mis à jour le 26.03.2025 à 15h21

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Jean-Gabriel Faget, directeur général d’Enercal, lors de la présentation du bilan 2024, mardi 11 mars. Photo A.-C.P.
Consommation électrique en baisse, résiliation "historique" de 2 000 contrats, augmentations de tarif, décarbonation de l’énergie, enjeu du stockage, etc. Jean-Gabriel Faget, directeur général d’Enercal, a dressé le bilan de l’activité de l’opérateur en 2024 et annoncé les projections pour les années à venir, lors d’une conférence de presse mardi 11 mars.

Métallurgie : une consommation électrique en baisse

En Nouvelle-Calédonie, "la métallurgie pèse lourd dans le bilan électrique", introduit Jérémy Ventura, responsable du service transport et système électrique chez Enercal, lors d’une conférence presse dédiée au bilan 2024 et aux projections, mardi 11 mars. L’année dernière, le secteur a consommé 65 % de la production d’électricité contre 35 % pour la distribution publique (particuliers, professionnels et collectivités). Un ratio inhabituel. "On avait plutôt un chiffre de l’ordre de trois quarts, un quart avant l’arrêt de KNS", note Jérémy Ventura.

Pour autant, la consommation a particulièrement chuté en 2024, passant de 3 200 GWh par an en moyenne de 2017 à 2023, à 1 905 GWh. En cause, la fermeture de KNS, l’arrêt de Prony Resources pendant plusieurs mois, et la baisse d’activité de la SLN en raison de la crise. En clair, "l’année a été très atypique par rapport à ce qu’on a connu avant".


La production électrique pour les métallurgistes peine à se mettre au vert. À noter que l’arrêt de KNS a provoqué une baisse de l’utilisation du charbon. Infographie Enercal

2 000 résiliations de contrats, "une chute historique"

La consommation des particuliers, entreprises et collectivités a connu la même trajectoire baissière (-7,5 %) que celle des métallurgistes par rapport à la moyenne des années précédentes, qui s’établissait à 830 GWh par an entre 2017 et 2023, contre 766 GWh en 2024. Là aussi, plusieurs explications, dont certaines liées au contexte des émeutes – fermeture d’entreprises et départs -, mais aussi l’augmentation de l’autoconsommation avec le photovoltaïque, qui représente 16 % de la production.

Un total de 2 000 résiliations de contrats a été comptabilisé. "Il s’agit d’une chute historique ces 30 dernières années. Pour la première fois, on connaît une décroissance du nombre de consommateurs, alors qu’on constatait une croissance régulière. Le coup d’arrêt a été donné par les événements de mai", développe Jean-Gabriel Faget, directeur général d’Enercal.

À noter que la production d’électricité pour les Calédoniens est désormais majoritairement renouvelable. Concernant le thermique, la part du charbon a diminué, notamment à la suite de la guerre en Ukraine, qui avait fait bondir son coût. Conséquence, les émissions de CO2 ont chuté de deux tiers entre 2018 et 2024. Le coût de production a également évolué, passant de 15 à 23 francs le kWh.


Enercal note l’augmentation du solaire, qui représente aujourd’hui le quart de la production de la distribution publique. Infographie Enercal

Deux augmentations de tarif en deux ans

La problématique remonte à 2013. À l’époque, la Nouvelle-Calédonie a décidé de fixer le tarif de l’électricité que payent les Calédoniens à un coût inférieur à son prix de revient, annonçant qu’elle versera la différence à Enercal. Or, cet engagement n’a pas été respecté par les gouvernements successifs. Résultat, le territoire a cumulé une dette astronomique auprès de l’opérateur, qui s’élevait à 20,6 milliards de francs au 30 septembre 2024. Le Congrès a fini par voter, en août, un texte visant à ce qu’Enercal retrouve l’équilibre d’ici deux ans.


À partir de 2027, le prix de vente de l’électricité sera automatiquement aligné sur le coût réel, qu’il soit à la hausse ou à la baisse. Infographie Enercal

Pour ce faire, le document prévoit trois augmentations de tarif de 10 %. Une première est passée en octobre 2024, une autre est prévue en octobre cette année, et une dernière en octobre 2026. À partir de 2027, les Calédoniens paieront le "juste prix" de l’électricité, qui sera réajusté à la hausse ou à la baisse chaque trimestre, en fonction des évolutions du coût de production, à l’image de ce qui existe pour le carburant. "À l’issue de la phase de transition, on aura un système à l’équilibre", affirme Jean-Gabriel Faget.

Mais d’ici là, le système va continuer à être déficitaire d’à peu près 400 millions de francs par mois. Cette somme, la Nouvelle-Calédonie s’est engagée à la prendre à sa charge. Près de 5 milliards sont inscrits au budget 2025 et 3,7 milliards devraient l’être en 2026. La collectivité doit, en outre, rembourser les 20,6 milliards à Enercal entre 2026 et 2029.


La Nouvelle-Calédonie devra trouver les ressources financières nécessaires pour verser près de 30 milliards de francs à Enercal d’ici 2029. Infographie Enercal

Décarboner l’énergie du nickel et stocker le solaire, des enjeux pour les années à venir

Parmi les objectifs pour 2035, Enercal ambitionne d’améliorer le mix énergétique en faveur du renouvelable et, au niveau du thermique, de délaisser le pétrole et le charbon au profit du gaz, moins émetteur de CO2. Autre projet, prévu par le Stenc 2.0, approuvé en 2023, qu’un seul opérateur gère l’ensemble du système électrique, "la seule solution pour décarboner", explique le directeur général.


Les projections prévoient le développement du solaire, à condition de créer des moyens de stockage, batteries et surtout STEP. Infographie Enercal

La priorité reste le développement de moyens de stockage. Une nécessité pour continuer à faire croître la part du photovoltaïque, puisque sans stockage, le solaire produit en journée mais non utilisé est perdu, ce qui pèse sur les coûts de production. "On a atteint, il y a deux ou trois ans, les limites de la capacité de consommation de la distribution publique. L’énergie solaire produite est, à certains moments, trop abondante par rapport à la consommation des Calédoniens. Un surplus que nous vendons parfois à la SLN", détaille Jean-Gabriel Faget.

Une première installation de batterie est prévue en 2026 à Boulouparis, puis en 2028 à Tontouta. Mais, c’est le projet de STEP (station de transfert d’énergie par pompage) à Tomo en 2030 (puis un autre à Vavouto en 2035), qui porte tous les espoirs. Enercal travaille dessus depuis trois ans et l’a notamment présenté à Manuel Valls lors de son déplacement en Nouvelle-Calédonie fin février. La STEP, un système qui a plus d’un siècle et existe dans de nombreux pays du monde, constitue une des meilleures solutions, considère Jean-Gabriel Faget. "C’est le plus économique dans la durée", avec une durée de vie de "plusieurs générations". Reste l’investissement colossal de départ : 50 milliards de francs pour la seule STEP de Tomo. Le seul moyen de financer un tel projet ? "Un soutien massif de l’État." "La question de l’électricité fera partie de celle autour de la métallurgie, puisqu’en baisser le prix est un enjeu pour la pérennité de la filière."


Les STEP sont composées de deux bassins situés à des altitudes différentes. Elles permettent de stocker l’énergie en pompant l’eau du bassin inférieur vers le supérieur lorsque la demande électrique est faible, et de restituer l’électricité sur le réseau en turbinant l’eau du bassin supérieur lorsque la demande augmente. Infographie Enercal

Bientôt la fin du rachat du photovoltaïque

Les prix pourraient-ils augmenter dans un avenir proche ? S’il est difficile de le prédire, Jean-Gabriel Faget explique que la Dimenc (direction de l’industrie, des mines et de l’énergie) veille au grain. Des décisions visant à réduire le coût de l’électricité ont même été prises l’an dernier. "À titre d’exemple, le gouvernement a revu à la baisse à hauteur de 5 % les revenus des deux distributeurs, et il vient de décider de mettre un terme au rachat d’électricité pour les nouveaux contrats d’installation photovoltaïque sur toiture. De 21 à 15 francs le kWh, il passera à zéro au mois de juillet." Autre changement : Enercal a renégocié à la baisse la formule qui dédommage les producteurs de l’électricité que l’opérateur ne prend pas.

Et aussi


EEC et Enercal se partagent le marché de la distribution.

Deux distributeurs : une source de surcoût

Aujourd’hui, Enercal et EEC se partagent le marché de la distribution de l’électricité en Nouvelle-Calédonie. Enercal couvre 25 communes + Tontouta, soit 44 142 contrats (39 %), et EEC 8 communes (dont Nouméa), soit 69 069 contrats (61 % du marché). Au total, cela représente 113 211 contrats. Ce fonctionnement induit parfois un doublon dans les dépenses (deux systèmes d’information clientèle, de conduite des réseaux, d’information géographique, etc., là où il pourrait y en avoir qu’un). "Dans l’absolu, c’est une source de surcoût d’avoir deux opérateurs de distribution sur un si petit territoire, cela crée un certain nombre de gaspillages, conclut Jean-Gabriel Faget. Mais, la question du comment reste entière, elle n’a jamais été résolue."

L’arrêt de KNS a eu un effet sur les prix

Enercal a noué des partenariats avec les métallurgistes, à qui elle peut racheter de l’énergie en cas de besoin. L’arrêt de KNS et le ralentissement des deux autres usines ont eu un petit effet sur les prix. "On achetait de l’énergie à KNS par moments moins chère que ce qu’on savait la reproduire par ailleurs", explique le directeur général. Ce surcoût a été chiffré "à 200 millions de francs par an sur un système qui pèse à peu près 35 milliards. Donc, c’est relativement marginal".

Une dette "technique"

Avec une trésorerie dans le rouge depuis cinq ans, Enercal a accumulé une dette technique, se retrouvant dans l’incapacité de financer un certain nombre de travaux d’entretien, "repoussant des investissements, ainsi qu’un certain nombre d’opérations de maintenance". La "ligne rouge" étant de ne pas altérer la sécurité des ouvrages et des personnes. "On a reporté des dépenses de gros entretiens, et c’est cet argument qui a aussi pesé dans la décision du gouvernement et du Congrès l’année dernière de procéder à cet ajustement, parce que ça ne pouvait pas durer beaucoup plus longtemps. Sinon, cela se serait traduit très certainement par des taux de panne et des défaillances de plus en plus nombreuses. On a réagi à temps, et nous allons nous employer à résorber cette dette technique."

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