
Face à l’ampleur de la consommation d’ice chez nos voisins polynésiens, l’assemblée a adopté, vendredi 4 juillet, une résolution demandant à l’État d’en faire une priorité absolue. À l’unanimité. Ce vote répond au discours du président du pays, Moetai Brotherson, qui déclarait en février qu’il fallait en faire une "urgence nationale" et que l’État en fasse plus dans le domaine. La Polynésie a également alloué dans son budget 250 millions de francs pour la prévention.
Selon le rapport de la commission des institutions, la juridiction de Papeete a enregistré une hausse de 28 % des affaires liées à l’ice l’année dernière, et son funèbre cortège de "saturation préoccupante du système judiciaire", de "répercussions alarmantes dans les quartiers sensibles", de "structuration croissante de réseaux criminels" et d’implication grandissante de mineurs. Le trafic "fragilise les familles, entretient le décrochage scolaire, pousse à la délinquance, au surendettement ou encore à la prostitution." "Il n’y a aucune fête où il n’y a pas d’ice", a déclaré Oscar Temaru (figure du Tavini, parti indépendantiste).

L’assemblée réaffirme la nécessité de faire plus et mieux en matière de prévention, de sécuriser l’accès aux soins par des moyens humains et financiers, de financer l’action des communes et des associations, de renforcer les moyens des forces de l’ordre et de la justice, ainsi que la coopération internationale. La résolution appelle enfin à protéger les témoins et les lanceurs d’alerte.
Le texte demande aussi à l’État de "renforcer la dissuasion pénale", jusqu’à "la réclusion criminelle à perpétuité pour les cas les plus graves" - la peine maximale en matière de drogues est de 20 ans de réclusion pour production ou fabrication illicite de stupéfiants, et la peine la plus lourde prononcée en Polynésie a été de 15 ans.
De là à ce que la France en fasse une cause nationale et change la loi parce que la Polynésie souffre d’un problème d’ice, il y a un grand pas. L’ice n’est pas un produit largement consommé dans l’Hexagone, a rappelé Nahema Temarii, ministre des sports, de la jeunesse et de la prévention contre la délinquance, et "on n’a aucun modèle de réussite sur le sevrage, la prise en charge médicale et la réinsertion professionnelle". Elle n’a pas mâché ses mots pour dire que l’État devrait exercer plus efficacement ses missions régaliennes, rappelant aussi que la Polynésie pourrait voir arriver le Fentanyl sur son territoire. "Il est temps que l’État prenne ses responsabilités sur le contrôle de l’entrée des marchandises", quels que soient le mode et le point d’entrée. La ministre a insisté sur la nécessité "d’arrêter de dédramatiser", en référence aux propos du haut-commissaire, qui avait déclaré sur Polynésie La 1ère qu'"il ne faudrait pas que l’arbre de l’ice et du cannabis cache la forêt de l’alcool" et qu’il ne pensait pas "qu’en condamnant à 30 ans de prison toute personne qui a fait un trafic d’ice, on règle le problème."