
Les spéculations ont été nombreuses, depuis les émeutes, concernant la diminution estimée du produit intérieur brut (PIB) calédonien, certains évoquant un recul atteignant jusqu'à 30 %. Dans son rapport annuel publié en début de semaine, l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM) avance un chiffre plus raisonnable, mais inédit : le PIB de la Nouvelle-Calédonie a reculé de "10 à 15 %" en 2024, soit un niveau compris entre celui des années 2013 et 2017.

La crise du nickel et les tensions politiques avaient déjà participé à son effritement, début 2024. Mais les émeutes ont provoqué une "chute historique" de l’indicateur du climat des affaires (ICA), observe l’IEOM. L’ICA s’établit à 75,7 en moyenne en 2024, en recul de 24,5 points par rapport à 2023. Un plus bas jamais atteint auparavant. Une timide reprise a toutefois été constatée au dernier trimestre 2024, il demeure à un niveau particulièrement faible, encore inférieur à celui atteint début 2020, lors de la pandémie de Covid-19.
En 2024, selon les données provisoires de l’IEOM, la Nouvelle-Calédonie compte 59 914 emplois salariés du privé. Un niveau inférieur à celui de 2010. La crise insurrectionnelle a entraîné la destruction de 8 134 emplois du privé, soit une baisse de 12 %. "L’ensemble des secteurs d’activité est affecté par les pertes d’emplois", affirme l’institut. Le secteur de la construction reste toutefois le plus affecté (- 1 268 emplois) ainsi que celui de l’industrie (- 2 348 emplois), en lien notamment avec l’arrêt de l’activité de KNS. Cette baisse des emplois est particulièrement concentrée en province Sud, qui représente 61 % des emplois détruits.
Si l’inflation a été relativement maîtrisée en 2024, avec un indice des prix à la consommation de + 1 %, les prix des denrées alimentaires ont continué de grimper. En moyenne annuelle, la hausse s’établit à 3,3 %. Elle reste toutefois moins importante qu’en 2023 et 2022, où elle avait atteint respectivement + 4,8 % et + 6,8 %.
Par le blocage de plusieurs sites miniers importants, les émeutes de 2024 ont provoqué une chute sans précédent de la production de minière en Nouvelle-Calédonie. Elle s’est établie à 9,4 millions de tonnes humides (th), soit – 50,7 % sur un an. L’extraction de minerais latéritique recule de
61,1 % (- 3,2 millions de th) et celle de minerais saprolitique de 46,7 % (- 6,4 millions de th). Quant à la production métallurgique, c’est-à-dire la transformation du minerai, elle régresse également : – 48,6 %, soit – 50 326 tonnes sur un an.

La SLN affiche une production de 32 900 tonnes en 2024 (contre 44 800 en 2023, soit – 26,6 %). PRNC, seule usine à produire du Nickel Hydroxyde Cake (NHC), un produit intermédiaire non raffiné contenant environ 17 % de nickel et 2,5 % de cobalt, a vu sa production considérablement diminuer (-50,2 %) en raison de la mise à l’arrêt de l’usine pendant plus de 6 mois en 2024.
Crise du nickel et fermeture d’usines signifie forcément moins d’exportations pour la Nouvelle-Calédonie. En effet, l’industrie métallurgique représente plus de 90 % des exportations de biens du pays. En 2024, les produits issus de l’industrie métallurgique et de la mine ont baissé, en valeur, de 95,9 milliards de francs. Toutes confondues, les exportations ont baissé de 40,7 % l’année dernière.
En 2024, l’activité bancaire a été très affectée par les conséquences des émeutes du 13 mai 2024 sur l’économie calédonienne. La production de crédit (hors découverts) sur l’année chute à un niveau historiquement bas pour atteindre 87 milliards de francs, en net retrait par rapport à 2023 (- 48,8 %). Ce recul historique de la production de crédit pèse fortement sur l’encours de crédits de la place bancaire, qui baisse de 3,6 % en glissement annuel au 31 décembre 2024.
D’autre part, le nombre de cartes bancaires en circulation à fin 2024 en Nouvelle-Calédonie a atteint 282 065 unités, en baisse de 3,8 % sur un an (- 11 001 cartes). Le nombre de cartes internationales baisse pour la première fois (- 4,6 %, soit – 9 078 cartes) après une croissance continue depuis 2005. Les opérations de retrait par carte bancaire dans les distributeurs du territoire ont également fortement baissé en 2024, notamment en raison des émeutes et de leurs conséquences économiques (- 13,6 %, après + 2 % en 2023). Le montant moyen d’un retrait dans un distributeur automatique, qui oscillait autour de 11 000 francs entre 2010 et 2017, s’établit à 10 600 francs en 2024.