
Ce n’est qu’après avoir avalé 6 km de piste au cœur du parc provincial de La Dumbéa que l’ouvrage apparaît, coincé au milieu des montagnes. Surplombé d’une immense grue installée dès le démarrage des travaux, le barrage de Dumbéa poursuit sa transformation entamée en décembre 2022. L’édifice, construit entre 1951 et 1953, alimente en eau potable la ville de Nouméa, l’usine SLN de Doniambo et une partie de la ville de Dumbéa.

Il fait l’objet d’un vaste chantier de mise en conformité mené par le gouvernement, visant notamment à garantir sa résistance face à une crue millénale (dont le risque de survenue dans une année est de 1 sur 1 000 et qui équivaut à un débit de 2 360 m3/s). Il était, jusqu’ici, largement sous-dimensionné et ne répondait plus aux normes françaises. En 2016, une revue de sûreté avait pointé la capacité insuffisante de l’évacuateur de crue, dimensionné pour supporter simplement une crue centennale.
Ainsi, après quasiment un an de réfection de la piste pour permettre un accès aux engins de chantier, les ouvriers ont procédé à la découpe de la partie haute du barrage afin d’élargir les seuils de déversement, c’est-à-dire l’endroit d’où s’écoule l’eau en cas de fortes crues. L’élargissement de 32 m, soit environ 1 500 tonnes de béton retirées, devrait augmenter de quasiment 1 000 m3/s la capacité de déversement du barrage de Dumbéa, et réduire ainsi la pression de l’eau exercée sur sa structure, le rendant davantage résistant. Avant ça, des dalles de réception avaient été construites sur les deux rives pour éviter un écoulement de l’eau sur le talus, ce qui aurait pu dégrader les fondations du barrage. Un chantier exceptionnel [1] qui vise avant tout à sécuriser cette ressource en eau essentielle, mais aussi à s’adapter au changement climatique, dont un des effets attendus est la multiplication des fortes crues.

Alors que les travaux présentaient déjà leur lot de défis (maintien de l’alimentation en eau potable pendant toute la durée du chantier, présence d’amiante, passage de randonneurs, réserve intégrale…), les équipes s’apprêtent à se lancer dans "la partie la plus délicate du chantier", a souligné Jean-Philippe Stouff, contrôleur du domaine public fluvial pour la Davar, lors d’une visite de chantier en présence de représentants du gouvernement, du haut-commissariat et de la commune de Dumbéa.
Elle va consister à l’achèvement de la découpe du seuil de déversement sur sa partie la plus basse, une ultime phase d’élargissement qui va considérablement augmenter le risque de débordement. Cela signifie qu’au moindre épisode pluvieux intense, "l’eau va pouvoir déborder sur nos plateformes de travaux", explique Jean-Philippe Stouff. S’il est possible d’abaisser partiellement le niveau d’eau retenue en augmentant le débit de la vanne de déversement située au pied du barrage, cela pourrait s’avérer insuffisant en cas de fortes précipitations. Les ouvriers devront donc se montrer réactifs. "Dès qu’on sait qu’un épisode de pluie de plus de 40 mm est prévu, on démonte toutes nos plateformes par sécurité", annonce l’agent de la Davar. Une opération qui nécessite "une demi-journée" et pourrait entraîner des retards si elle était amenée à se répéter. Un "suivi météorologique spécifique" sera donc mis en place pour cette nouvelle phase de travaux. La Calédonienne des eaux, en charge de l’exploitation du barrage, a également entamé ce jeudi 31 juillet une astreinte pour contrôler le niveau de l’eau en permanence, soirs et week-ends compris.

Il s’agira également, dans les prochains mois, de mettre en place les 9 derniers "tirants d’ancrages", qui permettent d’éviter au barrage de se soulever sous la pression de l’eau malgré le retrait d’une partie de sa structure. Vingt-et-un dispositifs similaires ont déjà été installés. Enfin, le profil déversant du barrage sera reconstruit afin de l’uniformiser. L’achèvement des travaux de confortement est programmé à la fin de l’année.

Exceptionnel par sa technicité, le chantier du barrage de Dumbéa l’est tout autant par ses chiffres :
Quant à l’édifice en lui-même, ses dimensions sont également impressionnantes :