
Le 1ᵉʳ octobre, un spécimen d’Oryctes rhinocéros a été intercepté dans un piège installé à Mou, dans le district de Lossi, selon un communiqué du gouvernement. L’insecte a été identifié par le laboratoire d’entomologie de l’Institut agronomique néo-calédonien (IAC), confirmant sa présence pour la première fois hors de la Grande Terre où les premiers spécimens avaient été retrouvés en 2019. Une introduction qui est une "catastrophe écologique", estime Gérard Pasco, l’ancien président de la Chambre d'agriculture, l’une des toutes premières victimes du scarabée. Ce dernier a littéralement détruit les arbres de sa propriété située à proximité de l’aéroport de La Tontouta.
Officiellement, c’est sur le tarmac de La Tontouta qu’avaient été retrouvés les premiers Oryctes. Une version qui fait grincer des dents de nombreux professionnels, qui doutent que l’insecte se soit servi de la piste d’atterrissage pour s’introduire dans l’archipel. Selon plusieurs sources qui préfèrent conserver l’anonymat, le rhinocéros aurait été introduit dans des palmiers importés.
Aucune enquête des services phytosanitaires n’a cependant été réalisée afin de déterminer précisément la façon dont cette espèce extrêmement invasive a été introduite et les responsabilités potentielles. En 2019, le gouvernement a engagé une centaine de millions de francs pour tenter d’éradiquer le ravageur. Yorita Lauvray, une agricultrice membre du groupement de défense sanitaire végétal, s’interroge encore aujourd’hui sur les stratégies mises en place il y a six ans. "Il aurait fallu réagir rapidement et mettre en place une quarantaine de la zone qui était initialement infestée", explique-t-elle. Yorita Lauvray rappelle pourtant que, dès les années 1980, l’entomologiste Paul Cochereau alertait déjà sur le risque d’introduction de cette espèce en Nouvelle-Calédonie. "D’après lui, c’était l’une des pires choses qui pouvaient arriver à la Nouvelle-Calédonie", souligne-t-elle.
Après quatre ans de tentatives d’éradication, le gouvernement a fini par se résoudre à la présence du scarabée. Les services du gouvernement ont notamment tenté d’importer un champignon censé contribuer à son éradication, mais selon une source, les fournisseurs ont décliné les offres du gouvernement, jugeant les quantités demandées trop faibles.
Depuis, l’objectif n’est plus d’éradiquer le ravageur, mais de limiter sa diffusion et de protéger les zones encore indemnes. Les pièges installés sur la Grande Terre, qui avaient permis de capturer près de 14 000 insectes, ont été retirés. Seuls ceux sur les îles ont été maintenus afin d’assurer un contrôle de l’absence du scarabée.
L’introduction à Lifou pose la question du transport de matériel végétal. Selon Gérard Pasco, la vente de palmiers pour la réalisation d’aménagements paysagers gagnerait à être davantage surveillée. Des insectes ont par exemple été retrouvés en province Nord, à Pouembout, après la réalisation de travaux de ce type. Cela pourrait être également le cas pour Lifou. Le spécimen a été retrouvé à Mou, non loin de l’hôtel Wadra Bay où ont également été réalisés des travaux paysagers, impliquant potentiellement l’achat de plantes ornementales sur la Grande Terre.
Pour éradiquer les spécimens potentiellement présents à Lifou, le gouvernement a décidé, mercredi 22 octobre, d’augmenter l’enveloppe dédiée à la lutte contre cette espèce envahissante. Elle passera de 128 millions à 180 millions de francs. Le Sivap, service du gouvernement en charge du dossier, n’a pas donné suite à nos sollicitations.