
"Je ne pensais pas faire ce genre de conférence un jour, mais là on joue avec la sécurité de nos enfants." Devant la presse, Temaui Tehei, président du Cercle des nageurs calédoniens (CNC), s’est fait le relais, ce vendredi 5 décembre, d’une "situation ubuesque" qui menace le fonctionnement des clubs de natation calédoniens. Alors que les diplômes d’État d’une partie de leurs maîtres-nageurs, valable cinq ans, arrivent à expiration, ces derniers se trouvent dans l’incapacité de les renouveler. En cause : un "vide juridique" provoqué par l’adoption, en juillet 2023, d’une loi de pays visant à encadrer l’activité physique et sportive.
À travers ce texte, la Nouvelle-Calédonie a défini les contours de la profession d’éducateurs spécialisés pour l’ensemble des sports pratiqués sur le territoire, "mais n’a pas fait le travail nécessaire concernant le renouvellement des diplômes", souligne Sébastien Baldovini, président de la section natation à l’Olympique Nouméa. "Aujourd’hui, on a d’un côté le haut-commissariat qui estime que ce n’est plus de sa compétence, et de l’autre le gouvernement qui nous dit qu’il n’est pas en mesure de procéder au recyclage de diplômes", désespère-t-il, évoquant une "bagarre politique". "Chacun se renvoie la balle, ça fait deux ans que ça dure." Par conséquent, "notre seule solution est d’envoyer nos éducateurs à Tahiti ou en Métropole", ce qui nécessite "des moyens énormes" pour un simple renouvellement, "alors qu’il n’y a quasiment plus de subventions aux associations". Une configuration "intenable", juge Temaui Tehei.

À long terme, la situation pourrait conduire à un manque de maîtres nageurs au bord des bassins, ce qui aurait un impact direct sur "la sécurité publique". "Le rôle des clubs, c’est de prévenir le risque de noyade, particulièrement important sur un territoire comme la Nouvelle-Calédonie, note le président du CNC. Chaque année, on initie 1 000 enfants à la natation, c’est un pilier de la sécurité aquatique, une mission de service public qu’on risque de ne plus pouvoir remplir."
Les conséquences de ce blocage juridico-politique sont déjà là. Au 31 décembre, le diplôme d’État d’un maître nageur du club de l’Olympique arrivera à expiration. "Sa formation à Tahiti n’aura lieu que du 13 au 16 février", indique Sébastien Baldovini. Entre-temps, "il ne pourra pas enseigner". Dès lors, le club a décidé d’annuler une partie des stages organisés pendant les grandes vacances. "C’est malheureux, mais on ne peut pas prendre le risque de mettre quelqu’un au bord du bassin sans un diplôme valable."
C’est d’autant plus regrettable "qu’on dispose de toutes les compétences pour réaliser les formations en Nouvelle-Calédonie, mais on a personne pour les valider", déplore Temaui Tehei. Actuellement, cette problématique concernerait "une trentaine d’éducateurs" dont les diplômes arrivent bientôt à expiration. Les présidents des différents clubs demandent à l’État et au gouvernement de régler le problème. "Il faut qu’ils se concertent, on doit parvenir à une solution rapidement." Notamment parce que la problématique pourrait rapidement dépasser le cercle de la natation. En effet, plusieurs diplômes d’État nécessitent un recyclage régulier. "Les pompiers de Nouméa vont par exemple être confrontés à la même difficulté concernant leurs surveillants de plage", prévient le président du CNC.
Une des options avancées par les clubs serait la signature d’un arrêté du président pour "déroger" partiellement à la loi de juillet 2023, le temps de "modifier le texte". Les représentants de la discipline ont justement rencontré Alcide Ponga, jeudi 4 décembre. Ils attendent désormais des réponses du chef de l’exécutif.