
Dans l’atelier flambant neuf de Païta, rien n’a été laissé au hasard : bacs de rétention pour chaque flacon, étiquetages rigoureux, produits nocifs remplacés par des alternatives plus sûres. Pour Daniel Launay, gérant d’EIP, et Priscillia Fricotté, responsable commerciale et production, ces changements n’ont pas été qu’un ajustement technique : ils ont ouvert un nouveau chapitre de l’histoire de l’imprimerie familiale. "Le projet était dans les cartons depuis quelques années, mais il s’est accéléré quand on est venus ici", racontent-ils d’une seule voix. Avec l’installation à Païta en 2022, l’entreprise a trouvé le terrain idéal pour structurer une démarche environnementale ambitieuse et viser le label Imprim’Vert.
Créé en Métropole et géré par l’organisme Amigraf, le label est déployé en Nouvelle-Calédonie avec l’appui de la Chambre de commerce et d'industrie, qui accompagne et audite les entreprises candidates. L’exigence est forte : traçabilité des produits, substitution des matières dangereuses, suivi rigoureux des déchets et organisation adaptée des ateliers. "Nous avons mis deux ans pour adapter nos méthodes, revoir l’ensemble de nos produits et nos process", souligne Priscillia Fricotté.
Les contraintes sont nombreuses : éliminer les solvants les plus nocifs, trouver des substituts auprès de fournisseurs européens, mettre chaque liquide en bac de rétention, étiqueter rigoureusement les contenants, revoir l’organisation des postes de travail. "Avant, on pouvait renifler une bouteille pour deviner ce qu’il y avait dedans. Aujourd’hui, tout est consigné, tout est noté. C’est plus sûr, et surtout plus efficace", ajoute Daniel Launay. L’effort a aussi porté sur les salariés, une quinzaine de personnes. "Il fallait les convaincre et les former. On a préparé des présentations, montré des vidéos… Au départ, ça a demandé un ajustement, mais très vite, ils ont compris que c’était aussi en leur faveur : moins de risques, des gestes plus simples, moins de perte de temps", poursuit Priscillia Fricotté.
Loin de ralentir l’activité, ces nouvelles règles ont amélioré l’organisation. "On a gagné en productivité. Les produits sont rangés, identifiés, disponibles. On gaspille moins et on sécurise davantage la production", reconnaît la responsable de production. Même les déchets font l’objet d’une gestion rigoureuse : collecteurs agréés, certificats de destruction, parfois envoyés jusqu’en Nouvelle-Zélande. "Ça paraît lourd, mais en réalité, c’est un cadre qui nous oblige à rester rigoureux", renchérit Daniel Launay.
En avril 2025, EIP a officiellement décroché le label. Les retombées se font déjà sentir. "Certaines enseignes nous demandent d’apposer le logo Imprim’Vert directement sur leurs supports. Ça valorise leur propre démarche autant que la nôtre", observent les responsables. Dans les appels d’offres, le label devient un critère décisif. "Un appel d’offres, c’est 50 à 60 % du prix, 10 à 15 % les délais, et une part environnementale. Sur ce dernier volet, Imprim’Vert nous distingue clairement."
Dans une filière fragilisée par la fermeture de plusieurs acteurs, EIP bénéficie ainsi d’un avantage compétitif. Et cet atout ne se limite pas au marché : dans un contexte économique un peu morose, l’obtention du label a aussi servi de moteur en interne. "C’est un objectif positif qui a redonné du moral aux équipes", souligne la responsable production. "Imprim’Vert nous a obligés à revoir nos méthodes. Mais au final, ça nous a rendus plus solides et plus compétitifs."
La démarche s'est doublée d'un investissement énergétique. Sur le toit de Païta, 131 panneaux photovoltaïques (53 kWc) couvrent près des trois quarts des besoins de l'imprimerie. " C'était d'abord un choix économique. Une microcoupure pouvait griller une carte électronique à deux millions de francs. Aujourd'hui, on est protégés, et nos factures baissent ", souligne Priscillia Fricotté. L'installation répond aussi à une logique de cohérence avec le label Imprim'Vert : réduire l'empreinte énergétique tout en gagnant en autonomie. Les surplus produits le week-end sont réinjectés dans le réseau, générant un petit revenu complémentaire. " Ça fait sens avec notre démarche : moins tirer sur le réseau, et s'appuyer sur nos propres ressources ", ajoute-t-elle.
Made in [1] est le magazine de la Fédération des entreprises et des industries de Nouvelle-Calédonie [2].
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