
"C’est triste de vivre dans ce siècle et de voir qu’on fait ça a un peuple", témoigne cette participante à la cérémonie de recueillement et de solidarité en hommage aux victimes, organisée à la synagogue de Nouméa vendredi 19 décembre. Six jours après le terrible attentat qui a fait 16 morts et au moins 40 blessés lors des festivités organisées pour le premier jour de Hanoucca, sur la célèbre plage de Bondi Beach dimanche 14 décembre, l’émotion est toujours aussi forte. Les membres calédoniens de la communauté juive ont donc décidé de se mobiliser en proposant un office dédié.
Une attaque "terroriste" et "antisémite" fait 16 morts sur une plage de Sydney [1]
Si l’attentat antisémite a tant bouleversé, c’est aussi par la proximité entre la Nouvelle-Calédonie et l’Australie, explique Philippe Mestman, président de l’association culturelle israélite de Nouvelle-Calédonie (Acinc). "On a beaucoup de coreligionnaires, de concitoyens calédoniens qui passent leurs vacances ou résident en Australie. Bondi Beach, tout le monde connaît, c’est une plage vraiment iconique. Et donc on se sentait proches de ce qu’il s’est passé." Et puis ce jour-là, dimanche, à la synagogue, les membres de la communauté juive célébraient également le premier jour de la fête des lumières. "On faisait la même chose ici, avec une animation pour les enfants, les familles. Et c’est en rentrant à la fin de l’office et de la journée festive, qu’on a appris les informations à la télévision, raconte Philippe Mestman. Le retour à la réalité a vraiment été brutal. L’heure n’était plus à la fête, on a été très choqués."
Rapidement, les responsables de l’association reçoivent des appels. Du haut-commissariat, d’abord, qui cherche à savoir si des Calédoniens juifs sont sur place, afin de leur apporter un soutien moral ou logistique, dans le cas où il y aurait besoin de les rapatrier. "Ils voulaient qu’on communique auprès de notre communauté pour les informer." Et puis, dans son fonctionnement même, l’Acinc est en lien avec les représentations voisines. "Comme on n’a pas de rabbin ici, on est proches d’elles, parce qu’elles nous donnent des conseils, et pour les grandes fêtes, on essaye d’avoir des rabbins ou des officiants qui viennent d’Australie ou de Nouvelle-Zélande", déclare Philippe Mestman. Alors les membres calédoniens de la communauté ont souhaité ce moment "pour montrer leur fraternité avec leurs confrères de Sydney".

Des responsables politiques ont également manifesté leur soutien. Hier soir, dans la synagogue, des représentants de la province Sud, du Congrès, mais aussi la maire de Nouméa, Sonia Lagarde, le député Nicolas Metzdorf, ou encore les membres du gouvernement Isabelle Champmoreau et Jérémie Katidjo Monnier étaient présents. "Et puis, on est toujours dans la fête de Hanouka, l’attentat a eu lieu le premier jour, on est au sixième jour, la fête se termine dimanche, une semaine pile après, donc il nous semblait important de pouvoir commémorer ce moment" ajoute Philippe Mestman, qui a ajouté, lors de son discours, que les juifs en Nouvelle-Calédonie "se sentaient bien intégrés", "dans un environnement loin de l’antisémitisme".
Ce genre d’événement, l’attentat de dimanche, ne devrait pas se produire, estime cette participante. "Normalement, une culture ne devrait pas être un obstacle. Les différentes cultures sont une ouverture et on espère que ça va changer." Se regrouper permet également à la communauté de partager un moment ensemble. "On se sent parfois très seuls, alors que ça concerne toute l’humanité. Le fait de se rassembler, c’est vraiment fort. On a de la peine, mais on continue à vivre. Et le but, c’est que ces lumières qu’on va allumer, elles s’allument quoiqu’il advienne", espère un autre. Car Hanoucca représente "la victoire de la lumière sur l’obscurité, la résilience du peuple juif qui, depuis des siècles, est parfois empêché de pratiquer sa religion, indique Philippe Mestman. Donc c’est très symbolique par rapport à ce qu’il s’est passé."