
"Cette année, on a fait beaucoup plus attention." Tania, 35 ans, mère de deux garçons, résume bien la tendance appliquée par de nombreux Calédoniens en cette période de fête et de cadeaux. Comme elle, la plupart des parents interrogés en ce lendemain de Noël disent avoir cherché "les prix les plus intéressants", quitte à faire un cadeau commun : "J’ai offert un jeu pour que mes deux enfants jouent ensemble", illustre la jeune femme. Les présents sont bien sous le sapin, mais l’effort s’est concentré sur l’essentiel. "Je n’ai pas pu me faire plaisir", confie-t-elle, évoquant une année "difficile", comparable à 2024.
C’est la même logique qu’a suivie Brigitte, 51 ans. "On mise d’abord sur les enfants et après, on pense à soi." Les dépenses sont faites "modérément", en tenant compte de "la situation économique du territoire", avec une priorité donnée au repas. Noël restant un rendez-vous familial, "calme", en comparaison au réveillon du 31 décembre, largement plus festif.
Du côté des couples sans enfants, les arbitrages ont pris une autre forme. Cette jeune Calédonienne, de retour sur le Caillou pour les vacances, explique avoir acheté ses cadeaux en France, "largement moins cher", sans difficulté à la douane. Car les prix pratiqués en Nouvelle-Calédonie ont de quoi freiner la consommation pour les foyers dont le pouvoir d’achat a chuté. Résultat : de plus en plus, les cadeaux matériels laissent place à des enveloppes. "Maintenant, c’est plus de l’argent que je donne. Ils en ont plus besoin que des cadeaux", explique son compagnon.
Ce n’est pas Benoît, papa d’une fille de 10 ans, qui dira le contraire. Patenté et en même temps salarié du privé, il dit avoir clairement revu son budget à la baisse. "On n’a pas travaillé de la même façon cette année." Autour de lui, beaucoup ont privilégié "un bon repas", en étant "un peu moins généreux en cadeaux". Une évolution qui se généralise selon lui : "C’est fini les Noëls à profusion. Maintenant, on fait plus attention au budget."
Du côté des commerçants, on a également ressenti cette prudence. À l’Anse-Vata, Stéphane, gérant d’un magasin du complexe La Promenade, évoque un Noël "pas comme les autres". La fréquentation a reculé d’environ un tiers et le panier moyen est passé "de 5 000 à 3 000 francs". Les "Secret Santa", cette tradition anglo-saxonne qui consiste pour les membres d’un groupe à s’offrir des cadeaux au hasard, auparavant réservés aux entreprises, se sont invités dans les familles aux budgets limités. Stéphane et sa compagne, eux, disent ne rien s’être offert : "On s’accroche en mode survie."
Dans ce magasin de cosmétiques du centre-ville, Audrey, vendeuse, parle d’une activité "correcte" mais irrégulière, avec "des pics et des creux". Elle pointe de son côté les départs en vacances. En se basant sur un indice parlant : la forte hausse des demandes de remise "duty-free", accordée sur présentation d’un billet d’avion. "Les gens ont vraiment plus voyagé", estime-t-elle.
Une analyse nuancée par Ronan Daly, président du Syndicat des commerçants. Selon les premiers retours, Noël 2025 se solde par "une baisse du chiffre d’affaires par rapport au Noël précédent", dans une tendance installée depuis "deux à trois ans". Pour lui, la reprise des voyages n’explique pas tout. "Avec les départs du territoire, le marché est plus petit et avec la crise économique, il y a une baisse du pouvoir d’achat." Même le Black Friday n’a pas inversé la courbe. Dans un contexte d’incertitude pour 2026, "les gens préfèrent économiser".