
Avec plus de 600 emplois créés ces six derniers mois [1], la Nouvelle-Calédonie remonte doucement la pente économique, plus d’un an après les émeutes. Mais la crise continue d’affecter un grand nombre d’entreprises, qui n’ont toujours pas retrouvé leur activité d’avant 13-Mai. Alors que les dispositifs de chômage total et partiel spécifiques, créés au lendemain de la crise pour soutenir les entreprises touchées et limiter les licenciements, ont pris fin le 30 juin, le gouvernement a proposé un projet de loi du pays afin d’instaurer deux nouvelles mesures destinées à "maintenir et favoriser le retour à l’emploi".
La première s’inscrit dans le prolongement du chômage partiel, même si son montant et son application évoluent par rapport aux dispositifs précédents. Jusqu’au 31 décembre, une nouvelle allocation calculée sur la base du salaire minimum garanti (SMG ou Smag) et plafonnée à 125 heures par mois sera attribuée, pour une période de trois mois renouvelable, aux entreprises qui bénéficiaient du chômage partiel lors des mois de mai et juin, ainsi qu’à celles "justifiant d’une réduction ou suspension temporaire d’activité due à la conjoncture économique, à des difficultés d’approvisionnement en matière premières ou en énergies, à un sinistre, à des intempéries de caractère exceptionnel, à une transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise ou toute autre circonstance de caractère exceptionnel", indique le texte.
L’allocation sera versée pour chaque salarié des entreprises éligibles, "y compris ceux en contrat d’alternance". Selon les services du gouvernement, la mesure pourrait concerner 4 000 salariés et coûter 4 milliards de francs. Une dépense contenue, "par rapport aux 13,6 milliards qu’aurait coûtée la mise en place d’un dispositif de chômage de droit commun copié sur celui de France métropolitaine" et un temps envisagée, a rappelé Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de l’économie. Un choix "responsable" pour répondre de façon urgente à "une situation économique encore très fragile", tout en évitant de "payer l’assistanat". "On est déjà hors délai, parce que depuis l’arrêt du chômage partiel au 30 juin, il y a 4 000 Calédoniens qui se lèvent tous les matins sans savoir s’ils vont toucher un salaire à la fin du mois."
L’instauration de l’allocation a justement été complétée par un système de rétroactivité au 1er juillet, afin d’assurer la continuité des aides. L’élargissement du dispositif à d’autres entreprises en difficulté a fait débat, les élus du groupe UC-Nationalistes et FLNKS considérant qu’il éloignait la mesure de son objectif initial, à savoir soutenir les entreprises victimes du 13-Mai. Christopher Gygès a pris l’exemple de la société Plastinord, située à Pouembout et incendiée il y a dix jours, pour justifier cet élargissement. "C’est une entreprise qui ne faisait pas partie du dispositif de chômage partiel en mai-juin, mais qui se retrouve en difficulté aujourd’hui." Les élus se sont finalement mis d’accord pour reprendre les critères retenus dans le cadre du précédent chômage partiel (-30 % de chiffre d’affaires mensuel, réduction de trésorerie, etc.) dans l’intégration de nouveaux bénéficiaires.
L’autre mesure du projet de loi du pays, c’est l’introduction d’une dégressivité des cotisations patronales pour les entreprises qui embauchent. "Il y en a qui retrouvent de l’activité, mais hésitent à embaucher. Donc on vient prendre en charge une partie des cotisations patronales jusqu’à la fin de l’année", expose Christopher Gygès. La réduction intervient en effet jusqu’au 31 décembre, avec là aussi un effet rétroactif au 1er juillet. Elle sera appliquée pour les entreprises dès lors qu’elles procèdent à l’embauche d’un salarié, que ce soit par contrat à durée déterminée ou à durée indéterminée, dont la durée doit toutefois être supérieure à six mois. Le plafond de l’exonération a été fixé à trois SMG majorés de 150 %. Sur une base de 3 000 emplois créés, le coût de la mesure s’élèverait à 380 millions de francs.
Un amendement, déposé par la rapporteure du texte Muriel Malfar-Pauga (Intergroupe Loyalistes), est également venu instaurer un abattement temporaire de 75 % des cotisations patronales au bénéfice des Ehpad, sans condition d’embauche. En effet, ces établissements "font actuellement face à d’importantes difficultés financières", a alerté cette dernière. Or, ils ne peuvent pas se séparer de leur personnel sans rompre les termes de la convention qui les lie à la Cafat et leur impose un certain nombre de salariés par résident. Le coût de cette mesure est estimé à 140 millions de francs. L'ensemble des dispositifs du projet de loi sera financé dans le cadre d'un "fonds emploi" créé à la suite d'une convention entre la Nouvelle-Calédonie et l'Etat, et dotée d'une enveloppe de 13 milliards de francs pour financer le soutien à l'emploi. Le projet de loi a été adopté à l’unanimité.