
Près de mille personnes ont perdu la vie dans les inondations qui ont dévasté l’île de Sumatra et sa région, à partir de fin novembre. Plus de 220 autres étaient encore portées disparues jeudi 11 décembre, selon les autorités.
Sumatra abrite une espèce particulièrement rare, l’orang-outan de Tapanuli, décrite pour la première fois en 2017 et qui compte moins de 800 représentants à l’état sauvage. Des chercheurs ont analysé des images satellites des dégâts provoqués par les crues, en particulier d’une des trois zones de Sumatra connues pour leur peuplement d’orangs-outans de Tapanuli, où vivaient 581 spécimens avant les inondations.
Et dans une version préliminaire d’un article qui doit faire l’objet dans les prochains jours d’une prépublication – donc avant évaluation par des pairs -, les chercheurs vont jusqu’à comparer les inondations à une "perturbation d’un niveau pouvant mener à l’extinction" des orangs-outans de Tapanuli. "Nous pensons qu’entre 6 et 11 % des orangs-outans (y) ont probablement été tués", indique le biologiste Erik Meijaard, spécialiste de ces grands singes, mettant en garde contre la grande vulnérabilité de l’espèce. Un orang-outan a déjà été retrouvé mort dans la région, ont indiqué les chercheurs.
Les images prises depuis l’orbite terrestre révèlent d’énormes plaies dans le paysage montagneux de Sumatra, parfois de plus d’un kilomètre de long et près de 100 mètres de large, décrit Erik Meijaard. Les chercheurs craignent que les vagues de boue, d’arbres et d’eau aient tout emporté sur leur passage, aussi bien les animaux sauvages que leurs sources de nourriture et habitats.
"Je n’ai jamais vu quoi que ce soit de pareil en 20 ans de suivi par satellite de la déforestation en Indonésie", déclare David Gaveau, expert de la télédétection et fondateur de la start-up de protection de l’environnement The Tree Map. Près de 9 % de la zone étudiée aurait été détruite.
Selon des travaux de recherche, le changement climatique engendre des épisodes de pluie plus intenses car une atmosphère plus chaude contient davantage d’humidité, et des températures plus élevées dans les océans peuvent amplifier les tempêtes.
Des écologistes, des experts et même le gouvernement indonésien ont aussi souligné la responsabilité de la déforestation dans les crues soudaines et les glissements de terrain survenus à Sumatra.