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    Nord
  • Anthony Tejero | Crée le 23.02.2024 à 16h48 | Mis à jour le 23.02.2024 à 18h01
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    Le garde des Sceaux salue le personnel, qui a été revalorisé au 1er janvier 2024 (les surveillants passant en catégorie B et les officiers en catégorie A) pour "redonner de l’attractivité à ce métier". Photo Anthony Tejero
    Pour son dernier jour de visite sur le Caillou, le ministre de la justice Éric Dupond-Moretti s’est rendu dans le Nord où il a inauguré le centre de détention flambant neuf de Koné, ouvert l’an passé. Un établissement qui accorde une large place à l’emploi et à la formation en vue de mieux préparer les détenus à leur sortie et ainsi lutter contre la récidive. Un "modèle à suivre", selon les mots du garde des Sceaux.

    Deux salles, deux ambiances. Si le personnel du centre de détention accueille le garde des Sceaux en grande pompe avec des couronnes de fleurs, au son des chants, des guitares et des ukulélés. Au détour de certains couloirs, la réalité carcérale résonne au loin depuis les quartiers de certains détenus, d’où fusent jusqu’aux oreilles du ministre de la Justice une flopée d’injures.

    Une façon de rappeler qu'aussi moderne et "digne" soit une prison, comme l'est celle de Koné, la vie quotidienne au sein de ces établissements reste des plus rudes. C'est pourquoi le centre de détention du Nord, ouvert en février 2023, est "sur tous les fronts" pour accueillir les détenus dans des conditions dignes de ce nom tout en leur permettant de préparer leur sortie et leur réinsertion.

    Un établissement "absolument unique et remarquable" qui doit faire figure de modèle jusque dans l’Hexagone, selon les mots d’Éric Dupond-Moretti, venu inaugurer cette prison, qui vise d’abord à "un rééquilibrage entre les provinces", notamment en réduisant les distances "afin de maintenir les liens familiaux" pour les détenus originaires du Nord.

    "Au Camp-Est c’est la nuit, à Koné c’est le jour"

    "Au Camp-Est, hier, c’était la nuit. À Koné, aujourd’hui, c’est le jour. La Nouvelle-Calédonie est en matière pénitentiaire la mieux dotée de France, à travers cet établissement. Et nous ferons la même chose pour remplacer cette horreur qu’est le Camp-Est, avec un établissement pénitentiaire sorti de terre au plus tard en 2032, a une nouvelle fois martelé le garde des Sceaux, qui "croit en la vertu" du travail et de la formation professionnelle en prison. "C’est en ce sens que cet établissement est un modèle. Le sens de l’effort n’est pas un sens interdit en centre de détention. Au contraire, cela redonne beaucoup de dignité au détenu qui prend en charge son avenir tout en apprenant une formation ou un métier. Ceux qui sortent avec ce bagage en poche sont plus armés pour affronter la vie civile qui les attend. Et nous avons tous intérêt à ce que les sanctions soient exécutées avec une certaine fermeté mais cela ne peut pas être la seule réponse. La prison c’est punir mais aussi assurer la réinsertion."

    "On a besoin d’outils pour participer à la société de demain"

    Pour ce faire, le centre de détention du Nord ne manque pas d’atouts concrets : parcelles d’expérimentation d’agriculture, d’agroforesterie, d’élevage, espace de médiation animale… Un cadre qui a très agréablement surpris ce détenu, resté trois ans au Camp-Est, avant d’obtenir son transfert à Koné, où il purge sa dernière année d’emprisonnement.

    "Ici, nous avons notre propre cellule, c’est presque l’hôtel par rapport au Camp-Est où les conditions sont totalement indignes et véhiculent une mauvaise image de la France, pays qui défend les droits de l’homme, estime cet homme originaire de Poum. Ici, on sait que nos familles et nos clans nous attendent. On sait qu’on se prépare à travailler à notre sortie pour être actifs plus tard. J’aurai plus d’outils entre les mains. On a besoin de ça pour participer à la société de demain car nul homme n’est à l’abri du délit."


    Au loin, certains détenus assistent à cette scène pour le moins inhabituelle. Photo Anthony Tejero

    "Nous sommes là pour leur permettre de sortir d’ici meilleurs qu’à leur arrivée"


    Edson Trebor, directeur du centre de détention de Koné. Photo Anthony Tejero

    Trois questions à… Edson Trebor, directeur du centre de détention de Koné

    Quel est l’objectif de ce centre de détention ?

    Nous avons réussi à mettre en place cet établissement où le personnel, qui est très engagé et originaire de ce territoire, prend en charge des personnes qui lui ressemblent sauf qu’elles ont eu des accidents de vie dans leur parcours. Elles sont donc là pour préparer l’après-détention. C’est l’objectif de cet établissement, tout comme de lutter contre la récidive. Nous nous donnons donc tous les moyens, dont une prise en charge sanitaire (médicale et psychiatrique) de qualité et optimale. Je viens de Métropole et peu d’établissements peuvent se targuer d’avoir une prise en charge de cette qualité.

    Il y a également des formations mises en place avec la province Nord, notamment sur le pôle maraîchage. Cette geôle va encore se développer. L’objectif, c’est de tendre vers l’autonomie alimentaire. Douze détenus travaillent en cuisine avec notre chef. Ces personnes sont engagées dans un procédé de VAE (validation d’acquis et d’expérience), c’est-à-dire qu’elles vont passer un bac pro ou un CAP.

    Avec 108 détenus actuellement, la prison est-elle déjà au bord d’être en surcapacité ?

    Pas du tout. Ici, les détenus sont dans des cellules individuelles. Il y a une capacité théorique de 120 places, mais nous disons que seulement 110 sont opérationnelles car dix places sont réservées aux arrivants. C’est-à-dire qu’un détenu qui vient de Nouméa ou de Métropole va d’abord passer une à deux semaines dans ce " quartier des arrivants " pour faire le tour des partenaires au niveau médical, des personnels de surveillance, de l’insertion et de la probation, etc. Et ce, afin de définir avec lui un parcours d’exécution de sa peine et les orientations qu’il veut donner à son séjour en détention en termes de formation professionnelle, voire de travail s’il a déjà des compétences pour progresser.

    Comment vous y prenez-vous concrètement ?

    Par exemple, cette semaine, notre premier détenu a réussi son permis de conduire. C’est le fruit d’un long procédé. Nous travaillons avec l’auto-école de Koné qui dispense les cours du code de la route, mais avant ça, les détenus doivent passer des tests en mathématiques et en français. C’est-à-dire qu’on aiguille les détenus qui sont déjà capables de réussir les examens. Sur neuf candidats, quatre ont réussi le code de la route et l’un d’entre eux vient donc de réussir la conduite. Nous sommes sur tous les fronts pour leur permettre de sortir d’ici meilleurs qu’à leur arrivée et avec des compétences nouvelles qui doivent leur permettre d’accéder à une formation professionnelle ou à un emploi.


    Une vaste parcelle test se situe à l’intérieur de la prison où les différentes techniques d’agriculture et d’aviculture sont expérimentées par les détenus. Photo Anthony Tejero

    Nous avons pour ce faire deux partenaires : la Sopac et Biscochoc. Avec l’usine de conditionnement de crevettes, nous avons deux CDD signés pour deux détenus en fin de peine. Avec Biscochoc, nous avons une concession en atelier où les détenus collent les étiquettes sur les emballages de chocolat. Cela leur permet de reprendre contact avec le monde du travail. Et enfin, nous préparons le sol en agroforesterie sur nos parcelles pour planter, d’ici un an et demi, les premiers pieds de cacao. L’idée, c’est de produire du cacao et du café. Nos partenaires rachèteront cette production de l’établissement. Cet argent servira aux détenus dans cette logique de leur permettre de sortir avec des atouts pour pouvoir s’insérer et travailler en tribu ou en commune.

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