fbpx
    Grand Nouméa
  • Julien Mazzoni | Crée le 21.11.2025 à 14h32 | Mis à jour le 01.12.2025 à 18h32
    Imprimer
    Chrystelle a repris le dessin, sous son nom d’artiste Sushy Shades, après le décès de son mari. Photo Julien Mazzoni
    Chrystelle a accompagné son mari jusqu’à son dernier souffle, dans leur salon, un après-midi de juillet 2024. Sans le Réseau de soins palliatifs, elle "n’aurait pas tenu". Ce vendredi 21 novembre, à l’espace Kari Véo, le 4e Forum des soins palliatifs met en lumière la place centrale de ces aidants, parfois invisibles, autour d’une journée de formation, d’ateliers et de sensibilisation sur la fin de vie.

    En mai 2024, quand les émeutes ont éclaté, Chrystelle courait de pharmacie en pharmacie en quête de médicaments pour son mari. "J’ai fait trois heures et demie de queue", souffle-t-elle. À son retour à la maison, il lui a simplement dit : "Je veux mourir chez nous." Ce vendredi 21 novembre, elle expose ses dessins au crayon à l’espace Kari Véo de la FOL, à l’occasion du 4e Forum des soins palliatifs. Une journée dédiée aux aidants, aux professionnels et à tous ceux qui, un jour, se retrouvent face à une maladie qui ne guérit plus.

    Chrystelle n’avait jamais pensé devenir "aidante". Cette épouse, mère de jumeaux, est devenue dessinatrice sous le nom d’artiste Sushy Shades, sur les conseils d’un thérapeute, pour l’aider à affronter un handicap invisible. Mais fin 2022, son mari est frappé par une leucémie. Départ en Australie, neuf mois d’hospitalisation, une greffe, l’espoir, fragile, puis la rechute, "incurable", en novembre 2023. "Sur ces mois de chimio, il y avait plus d’effets négatifs que de progrès", raconte-t-elle. En mars, son mari décide de tout arrêter.

    "Sans le Réseau, je n’aurais pas tenu"

    De retour à Nouméa, le Réseau de soins palliatifs entre dans leur vie. "Claire, l’infirmière, venait, elle gérait les traitements, elle appelait pour prendre des nouvelles. De mon mari, mais également de moi. Au début, j’étais surprise, je ne comprenais pas qu’on demande de mes nouvelles. Pour moi, c’est mon mari qui avait besoin d’aide, pas moi." Chrystelle découvre son propre rôle : veiller jour et nuit, expliquer la vérité à leurs enfants "mais en douceur", dormir sur un matelas près du lit médicalisé de son époux, tenir debout quand tout s’effondre autour d’elle.

    Les derniers jours, la douleur gagne. Le 1er juillet, l’infirmière lui dit : "Restez près de lui, c’est la fin." Elle appelle ses enfants. "On s’est retrouvés tous les trois autour de lui. Et j’ai dû fermer les yeux de mon mari." Elle marque un silence. "Sans le Réseau, je n’aurais pas tenu. On ne mesure pas ce qu’ils apportent tant qu’on n’y est pas confronté."

    Deux infirmières pour 200 patients

    Derrière ces accompagnements, il n’y a pourtant qu’une petite équipe. "Deux infirmières à mi-temps, qui sont au taquet", résume David Bilbault, coordinateur du Réseau de soins palliatifs. Et l’activité a bondi. Le service suit désormais 200 patients par an, avec une durée moyenne de prise en charge de quatre-vingts jours, contre 130 en 2023. Les infirmières couvrent une zone allant du Grand Nouméa jusqu’à Bourail quand l’urgence l’impose. "On n’a pas de liste d’attente à proprement parler, mais un délai de dix jours à deux semaines pour intervenir", précise Christelle Kern, infirmière coordinatrice.


    Christelle Kern et Claire Bensa, infirmières en soins palliatifs, ont dispensé une formation intitulée "Appréhender les enjeux de la fin de vie" auprès d’une trentaine d’aidants, ce vendredi 21 novembre, à la FOL. Photo Julien Mazzoni

    Créée en 2012, l’association vit principalement grâce à un financement annuel de l’Agence sanitaire et sociale. Le forum, lui, est pris en charge par le groupe de protection sociale Malakoff Humanis, via une enveloppe dédiée.

    "Les tabous génèrent des souffrances"

    Mais pour David Bilbault, l’enjeu de cette journée dépasse la question des moyens. "Une de nos missions, c’est d’instaurer une culture palliative. Apprendre à parler de la maladie, de la mort, de la fin de vie. Parce que les tabous génèrent les souffrances." Objectif : faire comprendre que les soins palliatifs ne sont pas "l’antichambre de la mort", mais un accompagnement global – médical, psychologique, familial – pour préserver la qualité de vie. "On peut être en soins palliatifs pendant des années", rappelle l’infirmière Christelle Kern.

    Cette quatrième édition met ainsi en lumière un maillon souvent invisible : les aidants. Sans statut, sans congés dédiés, souvent isolé, "un aidant s’oublie toujours", souligne David Bilbault. Chrystelle en est l’illustration. Elle pensait ne jamais en faire assez. Jusqu’au jour où un médecin lui impose de déléguer la toilette de son mari. "Vous risquez de ne pas tenir", la prévient-il. Aujourd’hui, Chrystelle a repris le dessin. "J’ai tout craché sur le papier" avant d’y remettre de la lumière. Elle a préparé un croquis qu’elle remettra en fin de journée au Réseau, "pour que d’autres aidants voient qu’on peut s’en sortir. Et qu’ils n’hésitent pas à faire appel à eux. Lorsqu’on est aidant, on a besoin d’aide nous aussi."

    Note

    Contacts : téléphone : 74 52 25/54 51 07 ; page Facebook : Réseau soins palliatifs NC ; e-mail : coordination@gmail.com

    MERCI DE VOUS IDENTIFIER
    X

    Vous devez avoir un compte en ligne sur le site des Nouvelles Calédoniennes pour pouvoir acheter du contenu. Veuillez vous connecter.

    J'AI DÉJA UN COMPTE
    Saisissez votre nom d'utilisateur pour LNC.nc | Les Nouvelles Calédoniennes
    Saisissez le mot de passe correspondant à votre nom d'utilisateur.
    JE N'AI PAS DE COMPTE

    Vous avez besoin d'aide ? Vous souhaitez vous abonner, mais vous n'avez pas de carte bancaire ?
    Prenez contact directement avec le service abonnement au (+687) 27 09 65 ou en envoyant un e-mail au service abonnement.
  • DANS LA MÊME RUBRIQUE
  • VOS RÉACTIONS