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    Nouvelle Calédonie
  • Charlie Réné / charlie.rene@lnc.nc | Crée le 26.04.2018 à 04h25 | Mis à jour le 26.04.2018 à 06h36
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    L’hypermarché a mis moins de 18 mois à être construit. « Les entrepreneurs ont mouillé la chemise, ils ont été formidables » reconnaît Michel Mees. Au plus gros de la construction, 160 ouvriers travaillaient sur place. Photos Thierry Perron
    CONSOMMATION. Premier « hyper » depuis 30 ans, le Géant Dumbéa-sur-Mer et son « Dumbéa Mall » ont été inaugurés hier soir. Visite dans le ventre de ce colosse de 11 000 mètres carrés, financé par le groupe Bernard Hayot.

    Les portes n’ouvriront officiellement que ce matin, mais le « Dumbéa Mall » a des airs de ruche depuis longtemps déjà. Artisans, entreprises de décoration ou d’entretien, livreurs et fournisseurs en tout genre se relaient depuis plusieurs jours sur l’immense parking qui surplombe la voie rapide, et se croisent, échelle ou diable à la main, dans le hall de la galerie marchande, à quelques pas du Médipôle. Tout doit être prêt pour le grand jour. Hier, quelques « réglages » restaient encore à faire, mais le centre commercial de 11 000 m2, lasers sur le toit, rideaux dans l’entrée, et tapis rouge aux portes, était prêt pour sa soirée de vernissage. C’est que le groupe Bernard Hayot (GBH) a investi 6 milliards de francs pour ce deuxième Géant Casino, entouré d’une vingtaine de commerces et d’un « food court ».

    Un investissement qui méritait bien une soirée « d’avant-première », en présence de plus de 800 invités, où se croisaient élus et entrepreneurs de premier plan (ci-contre). Aujourd’hui, ce sera au tour des clients de découvrir le « Mall » et son hyper, le premier à sortir de terre depuis presque 30 ans. L’imposant édifice, construit en moins de 18 mois, est bien visible depuis la voie rapide et très attendu dans cette zone en plein boom de population. Les promoteurs ont veillé à ce que les images de l’intérieur ne circulent pas ces dernières semaines : ils comptent bien capitaliser sur la curiosité.

     

    « Tout sous le même toit »

    « On n’a pas souvent la chance de monter un tel projet en partant d’une page blanche, note Michel Mees, le directeur général de la SCIE*, filiale locale de GBH, qui exploite aussi les Leader Price, Casino et Vival. Il y a quinze ans, quand on a acheté le terrain (ci-contre), on savait que cette zone aurait besoin d’un hyper de bonne taille et une galerie marchande assez importante pour être un vrai relais de commerce dans l’agglomération ». La « bonne taille » ? 4 500 mètres carrés. « Une surface adaptée au pays, assure le directeur de la SCIE, qui avait demandé 1 000 m2 de plus aux autorités. La désaffection des hypers de 12 000 m2, en Métropole, c’est l’anonymat, la corvée du week-end. On n’a pas voulu faire une cathédrale de la bouffe, il faut qu’on se sente bien dans ce magasin ». Plus que la taille, « l’enjeu, c’était de contenir tous les métiers de l’hyper », complète Gilles Klaus, le directeur du magasin. Même si les rayons vêtements ou équipements sont plus petits que les autres hypers (5 700 à Sainte-Marie et 6 500 m2 à Kenu-In) le principe du « tout sous le même toit » et la « profondeur de gamme » propres aux très grandes surfaces sont là.

     

    Au total, 17 000 m2 et 270 emplois

    La « patte » voulue par Géant ? Une large place accordée à « l’espace marché », où l’on vend les produits préparés dans le magasin. Boulangerie, pâtisserie, fromagerie, rôtisserie ou boucherie… « Les clients doivent voir la cuisson du pain, le travail du boulanger », insiste Gilles Klaus. Ils ne verront toutefois pas tout : pour 4 500 m2 d’hyper, 4 000 de plus sont en arrière-boutique. Et le « Mall », de 11 000 m2 de surface commerciale, s’étend en fait sur plus de 17 000 m2.

    Avantage de la « feuille blanche », ces coulisses ont pu être dimensionnées et organisées pour un maximum « d’ergonomie ». Stocks stratégiquement placés derrière leur rayon, chaîne de froid ou de production optimisée… « On était tous au bord du précipice, cela fait 30 ans qu’un magasin comme ça n’a pas été fait ici, rappelle Michel Mees. Mais on a réfléchi collectivement, pris en compte le travail de chacun dans la conception ».

    Place désormais à la pratique. Les premiers employés ont été embauchés début mars, et les « labos » tournent à plein régime depuis plusieurs jours : « On a préparé à l’avance ce que l’on pouvait, mais surtout, il a fallu tester les machines, du dernier cri, et y former le personnel », détaille le directeur. Sur les 270 emplois du Mall, 166 salariés sont recrutés par l’hyper, dont 45 transférés depuis Sainte-Marie. « On profite de l’expérience de nos autres magasins, reprend Michel Mees. Mais aussi de l’enseigne Géant, qui nous a envoyé des formateurs, et de notre groupe », GBH, qui gère de nombreuses grandes surfaces aux Antilles ou à la Réunion. Comme ailleurs, le groupe promet une valorisation de la production du pays, une priorité à l’emploi local et de nombreux partenariats. « Mais surtout on veut donner un nouveau souffle au commerce dans un moment où tout le monde a tendance à baisser la tête », appuie le patron de la SCIE. Chez les clients, c’est surtout du côté des prix qu’on en attend beaucoup.

     

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    Le nombre d’hypermarchés après Carrefour Kenu-In et Géant Sainte-Marie.

     

    Repères

    Un « Mall » ?

    C’est dans les années 50 que les Américains revisitent ce terme, qui désigne en anglais une promenade ou un terrain de jeu (pall-mall). Les shopping malls sont de vastes centres commerciaux, où sont regroupées des dizaines de boutiques, dotés de restaurants ou de cinémas pour devenir des « lieux de vie » plutôt que des lieux de passage. Un modèle qui s’est propagé dans le monde entier, et qui débarque donc sur le Caillou : loin des standards asiatiques ou australiens en termes de taille, le Dumbéa Mall comporte tout de même un « food court », des services, 23 boutiques et des espaces détentes avec accès Wifi et prises pour recharger son téléphone… De quoi inciter à y passer du temps.

    GBH, dominant ?

    D’après les projections effectuées en 2016 par la DAE, le Géant Dumbéa devait conférer au groupe Bernard Hayot (Géant, Casino, Leader Price, Vival) 45 % des superficies de grandes surfaces dans le Grand Nouméa, et plus de la moitié du chiffre d’affaires global. Raison pour laquelle l’exécutif a demandé à GBH, de réduire de 1 000 m2 la voilure, et de se séparer de deux magasins (Leader Price Rivière-Salée et Casino Vallée-des-Colons) et de ses parts dans Casino Johnston avant d’ouvrir. Ce qui a été fait. GBH reste le numéro un de la grande distribution de la zone et du pays, avec près de 40 % des surfaces. Du moins avant la naissance, potentielle, de deux hyper U, à l’Anse Uaré et à Païta.

     

    Quinze ans de projet, et de débats

    C’est en 2003 que le groupe Lavoix fait l’acquisition d’un terrain à Dumbéa-sur-Mer, zone alors peu peuplée et peu équipée. « On était très en avance sur le développement de la Zac (zone d’aménagement concertée), mais on a tout de suite été associé au projet », explique Michel Mees, le directeur de la SCIE, qui rappelle qu’en 2008, un échange de terrains est autorisé avec la Secal, pour mieux intégrer le projet dans le quartier en devenir. En 2009, le cap est clair : un hypermarché de 5 500 m2 et 6 500m2 de galerie marchande à ouvrir en 2014. Reste à obtenir l’autorisation d’ouvrir de la province. Pierre Frogier en signe une première en 2010, contre l’avis de sa commission d’urbanisme. Mais la position déjà forte de Lavoix sur le marché fait jaser. Calédonie Ensemble, l’UFC-Que choisir, les petits commerçants de Dumbéa, et les concurrents (Carrefour) ou futurs concurrents (projet d’Hyper U de l’Anse Uaré de Romain Babey, hyper de Païta) font feu de tout bois contre le projet. En mars 2011, le tribunal casse l’autorisation… réaccordée en juin par Pierre Frogier. Cette fois, c’est l’Intersyndicale Vie chère, qui veut d’un troisième hyper, mais surtout d’un troisième opérateur, qui met la pression. Le rachat annoncé des activités de distributions de Lavoix par le groupe Bernard Hayot (GBH), connu pour son appétit dans l’outre-mer, ne fait qu’ajouter aux craintes. Les recours, là aussi, pleuvent.

     

    Les 1 000 emplois du groupe Hayot

    Ce sera finalement au gouvernement, chargé de l’application de la nouvelle loi antitrust, d’autoriser définitivement le projet. La demande est formulée en 2014, et l’exécutif poussera l’instruction jusqu’au dernier jour des délais légaux. Le 30 août 2016, le sésame tombe, en échange de la vente de trois magasins : le chantier est inauguré dans la foulée. Une pièce de plus sur l’échiquier de GBH. Le groupe, implanté dans tout l’outre-mer français, mais aussi en Afrique est donc le principal opérateur de grandes surface du Caillou. Mais il est aussi présent dans l’automobile (Hyundai, Mitsubishi, Nissan, Calebam, Speedy, Michelin...) et la construction (Sobeca). Au total, « GBH représente plus de 1 000 collaborateurs en Nouvelle-Calédonie », assure son directeur général.

     

    La famille Hayot « très confiante » dans l’avenir du pays

    Peu avant 20 heures, le ruban est coupé et le rideau tombe devant le magasin illuminé. Une ouverture « jour pour jour à la date prévue au début du chantier », salue Stéphane Hayot, le directeur général du groupe Bernard Hayot, créé par son père, également présent hier soir. C’est lui, aux côtés de Michel Mees, directeur de la filiale locale, et le maire de Dumbéa, Georges Naturel, chaudement salué pour avoir « soutenu le projet depuis dix ans », qui s’est chargé de l’inauguration. « Nous sommes très confiants dans l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, assure le Martiniquais dans son discours. En la comparant avec d’autres zones où notre groupe est présent, nous sommes frappés par son dynamisme. »

     

    Une convention avec la FINC

    Mais Stéphane Hayot, qui sait que les appétits de GBH sont souvent vus d’un mauvais œil, a surtout demandé à ce que « cette confiance soit réciproque ». « Nous avons pleinement conscience des devoirs qui incombent à une entreprise comme la nôtre », explique le dirigeant, listant trois « convictions » de son groupe. La priorité à l’emploi local, « l’implication au-delà de nos métiers », via les fondations d’Hayot et, surtout, la valorisation de la production locale dont les ventes ont augmenté de 11 % en trois ans dans les magasins de GBH. Sa filiale SCIE a signé hier une convention avec la FINC pour mieux valoriser les produits locaux. Pas de quoi empêcher les « divergences de point de vue » entre les deux parties, mais la charte « définit les engagements volontaires et communs ».

     

    1989 : quand le Caillou découvrait « l’hyper »

    Une « vie moins chère et plus facile en Calédonie » clamaient les publicités en 1989. Du côté de Koutio, le commerce s’apprête à vivre une petite révolution. Les petites et moyennes surfaces, largement prédominantes jusqu’alors, devront faire face au premier hypermarché du territoire, qui ouvre ses portes le 22 novembre. Avec ses 5 000 mètres carrés (6 500 aujourd’hui) construits en dix mois seulement, Euromarché, pas encore Continent, encore moins Carrefour, est ouvert par le groupe Pentecost, qui n’a pas obtenu l’emplacement en pleine ville qu’il désirait, ni, pour le moment, sa bretelle depuis la Savexpress. Il est intégré dans un centre commercial de 14 000 mètres carrés et vingt boutiques : Kenu-In doit, à terme, regrouper « un tiers des emplois de Dumbéa », explique le maire d’alors, Bernard Marant. Le projet, qui avait levé beaucoup de scepticisme ne tarde pas à réveiller la concurrence. Trois jours après l’ouverture d’Euromarché, Océanie Sainte-Marie, alors simple « super » annonce qu’il sera « avalé » dès l’année suivante, par un hyper de 5 000 mètres carrés de surface commerciale (5 688 aujourd’hui), d’abord sous l’enseigne « Rallye », puis, sous l’égide du groupe Lavoix, sous la bannière Géant en 1995.

     

    Prix en baisse, incitation en hausse

    Plus aucun autre hyper ne sera créé avant le Dumbéa Mall, presque trente ans plus tard. Mais, dans le Grand Nouméa puis dans le reste du pays, les grandes surfaces se multiplient et surtout se franchisent, pour profiter des centrales d’achat et des marques distributeurs. Se modernisent, aussi : pour tenir face à ces nouveaux géants, qui ont sans aucun doute largement participé à la baisse des prix, il faut utiliser des techniques comparables. Comme le note le Mémorial calédonien : « Les petites bourses sont soulagées, mais aussi piégées : chariots surdimensionnés, friandises à portée de main, éclairage adapté, musique de fond forment un savant arsenal destiné à séduire papilles et pupilles. »

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