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    Nouvelle Calédonie
  • Julien Mazzoni | Crée le 28.10.2025 à 15h22 | Mis à jour le 31.10.2025 à 17h20
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    700 condamnés bénéficient chaque année de l’aménagement de peine en travail d’intérêt général, mais seules 52 places sont aujourd’hui recensées dans les structures coutumières. Photo archives LNC / J.A.-G.L.
    À l’initiative du Sénat coutumier, un séminaire réunira magistrats, agents pénitentiaires et autorités coutumières pour renforcer la mise en œuvre du travail d’intérêt général (TIG) sur terres coutumières le 5 novembre. Objectif : offrir une alternative à l’incarcération, notamment pour les jeunes, et donner du sens à la peine en renouant avec les valeurs de la coutume.

    Sous l’égide du Sénat, la justice et le monde coutumier poursuivent leur patient tressage. Après plusieurs mois de concertation, un séminaire intitulé "Fabrique du TIG en tribu" sera organisé le 5 novembre à Nouville. Il doit permettre de structurer un dispositif déjà expérimenté dans cinq aires coutumières, et d’en étendre la pratique à tout le pays. "C’est un travail que nous menons depuis le mois de mars, avec l’idée d’aider nos jeunes autrement que par l’enfermement", introduit le président du Sénat coutumier, Ludovic Boula. "Les TIG en terres coutumières permettent de redonner une place et un rôle à ceux qui se sont égarés", poursuit-il.

    Une forme de réconciliation

    Le travail d’intérêt général, peine alternative à la prison pour des délits mineurs, peut être prononcé directement par un tribunal ou parfois aménagé en fin de détention. En Nouvelle-Calédonie, environ 700 personnes exécutent chaque année un TIG, selon le Service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip). Mais seules cinquante-deux places sont aujourd’hui recensées dans les structures coutumières. "Il faut monter en puissance, notamment dans le Nord", insiste Divina Poedi, chargée de mission au Sénat coutumier, qui évoque par ailleurs un manque de matériel et de tuteurs formés : "Si on n’a pas de sabre ni de débroussailleuse ni de référent, on ne peut pas accueillir de tigistes."

    Pour la justice, l’enjeu dépasse la logistique. "Le TIG coutumier, c’est une autre manière d’exécuter une peine au plus près des valeurs et des gens", explique Gérald Faucou, président du tribunal de première instance de Nouméa, qui évoque une forme de réconciliation entre le condamné et la communauté. "À travers le travail, il demande pardon à la société. L’idée, c’est d’éviter la récidive et l’engorgement carcéral", précise-t-il. Le centre pénitentiaire de Nouméa, prévu pour 414 détenus, en compte encore plus de 550, malgré une baisse de 8 % en neuf mois.

    "Transmettre des valeurs"

    Le Spip voit dans ce partenariat "une démarche de prévention et de réinsertion". Son directeur, Éric Zinsius, salue "une coopération ancienne" avec le Sénat coutumier, "fondée sur la confiance et la volonté de coconstruire des solutions adaptées". Des TIG dits "pédagogiques", centrés sur les valeurs coutumières, sont mis en œuvre. Les autorités coutumières, de leur côté, veulent "donner du sens" à ces peines. "Dans nos tribus, on n’impose pas une corvée, on transmet une valeur. Le TIG, c’est aider quelqu’un à se réinsérer dans la société à travers ce qu’il apporte à la communauté", illustre Ludovic Boula

    "Ce qu’on construit ici est unique."

    Mais certains freins à la généralisation du dispositif persistent : réticence de certains à accueillir un condamné connu de tous, appréhensions face à la responsabilité du tuteur ou simple méconnaissance du mécanisme. Le séminaire a pour but de lever ces doutes en expliquant la procédure, les garanties et les conditions d’exécution.

    En toile de fond, un constat reste prégnant : plus de 90 % des détenus sont Kanak. Pour Divina Poedi, c’est une raison de plus pour agir : "Il s’agit de nos jeunes. À nous d’être acteurs de leur réinsertion." Un engagement qui, selon elle, implique de "prendre sa part", plutôt que d’attendre tout de l’administration.
    Le Sénat coutumier souhaite d’ailleurs relancer, dès 2026, des projets communs avec le centre pénitentiaire de Nouméa, afin de "recréer du lien entre le dedans et le dehors".

    Au-delà de la peine, le projet du TIG en tribu s’affirme comme une rencontre entre deux systèmes de valeurs, civile et coutumière, qui cherchent leur point d’équilibre. "Ce qu’on construit ici est unique", conclut le président Faucou.

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