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    Nouvelle Calédonie
  • Benoît Godart, directeur régional des douanes de Nouvelle-Calédonie
    Propos recueillis par Jean-Alexis Gallien-Lamarche jeanalexis.gallien@lnc.nc | Crée le 14.03.2023 à 15h45 | Mis à jour le 15.03.2023 à 08h34
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    "La voie maritime de la Nouvelle-Calédonie est utilisée par les organisations criminelles qui alimentent les marchés australiens et néo-zélandais en méthamphétamine", affirme Benoît Godart. Niko Vincent
    Multipliées par dix entre 2021 et 2022, les saisies de drogue de synthèse ont atteint un niveau historique sur le territoire. En première ligne, les services douaniers qui ont fait de la lutte contre le trafic la mère de toutes les batailles avec des moyens de détection plus performants.

    Quel est le bilan de la douane en matière de saisie de stupéfiants pour 2022 ?

    C'est un bilan très positif. En 2022, nous avons saisi 52 kilos de produits stupéfiants dont 50,5 kilos de cannabis et 1,5 kilo de cocaïne, MDMA et autres drogues de synthèse, y compris 2 800 buvards de LSD. Plus important encore, nous avons identifié et interpellé les individus qui importaient ces marchandises sur le territoire et avons fourni de précieuses informations aux services de police et de gendarmerie pour enrichir nos enquêtes dans un cadre judiciaire. Nous avons mis en place des critères de ciblage qui s'avèrent particulièrement pertinents. Nous avons développé des techniques d'enquête qui nous permettent d'aller au-delà de la simple saisie de marchandise à la frontière. Ce travail a notamment conduit au démantèlement de deux cannabicultures sur le secteur de Dumbéa et à l'identification de filières qui se structurent et qui utilisent des modes opératoires jusqu'alors inconnus sur le territoire.

    Vous avez multiplié la quantité de saisie de drogue de synthèse par dix entre 2021 et 2022. Comment analysez-vous cette hausse aussi importante ?

    En effet, les services douaniers, qui avaient saisi 150 grammes de cocaïne, MDMA et autres drogues de synthèse en 2021, ont appréhendé 1,5 kilo de ces mêmes produits en 2022. Cette augmentation tient principalement au renforcement de nos moyens en matière de formation et d'analyse de risque. Elle s'explique également par l'acquisition de nouveaux systèmes de détection et par la mise en place de moyens juridiques qui n'étaient pas exploités en Nouvelle-Calédonie.

    "Une équipe cynophile sera en mesure de détecter l'ice."

    Elle tient également au développement du renseignement et de la coopération internationale avec nos partenaires dont l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon, Singapour, l'Indonésie et les pays et territoires du Pacifique Sud notamment. Les premiers résultats pour 2023 confirment cette tendance comme illustré par la saisie historique d'un kilo de cocaïne début février et la mise en évidence d'une filière qui agissait depuis plusieurs mois entre la Métropole et le territoire.

    Quels sont ces moyens de détection et que vous permettent-ils de contrôler que vous ne pouviez pas faire auparavant ?

    Nous sommes dotés de nouveaux moyens dont trois scanners qui permettent d'approfondir la visite des marchandises en cas de doute. Nous venons d'acquérir un moyen nautique dont vous vous êtes fait l'écho dans vos colonnes la semaine dernière. Cela étant, le renforcement de nos moyens tient essentiellement à la mise en place d'une nouvelle stratégie et d'une vraie dynamique qui repose sur la mobilisation de nos équipes et la motivation de nos collègues, de Nouméa à Koné en passant par Ducos et La Tontouta.

    Les fonctionnaires des douanes ont suivi des formations spécialisées dans la fouille et la visite des navires. Leur expertise est aujourd'hui reconnue au-delà de la Nouvelle-Calédonie.

    Nous disposons également d'une équipe cynophile qui est particulièrement performante et nous sommes sur le point d'en former une seconde. Cette dernière sera en mesure de détecter l'ice, cette drogue de synthèse qui affecte la Polynésie, et le numéraire, contrepartie naturelle des trafics qui s'organisent localement.

    Est-ce que la douane calédonienne participe à des enquêtes internationales ?

    Effectivement, nous participons activement aux enquêtes internationales sur les narcotrafics qui affectent la région. À ce titre, en dix ans, nous avons saisi ou contribué directement à la saisie de 4,5 tonnes de cocaïne et d'une tonne de méthamphétamine dans les eaux calédoniennes et australiennes.

    Est-ce que vos efforts se concentrent aussi sur les navires qui font des relâches près de nos côtes et qui pourraient transporter de grosses quantités de drogue en direction de l'Australie ou de la Nouvelle-Zélande ?

    Oui, tout à fait. La Nouvelle-Calédonie est située sur la route de la cocaïne entre l'Amérique du Sud et l'Australie. Cette voie maritime est également utilisée par les organisations criminelles qui alimentent les marchés australiens et néo-zélandais en méthamphétamine. À ce titre, notre attention se porte sur les navires et les équipages qui font l'objet de signalements ou pour lesquels des faisceaux d'indices laissent à penser qu'ils transportent des produits stupéfiants. Dans ce cadre, l'échange de renseignements avec les services étrangers joue un rôle fondamental, de la même manière, la coopération opérationnelle avec les Forces armées de la Nouvelle-Calédonie (Fanc) est cruciale pour intervenir avec des moyens hauturiers notamment.

    Luttez-vous contre la contrefaçon et de quelle manière ? Est-ce que le territoire est touché par cette fraude ?

    Oui, d'une façon générale, nous luttons contre les contrefaçons et toutes les atteintes aux droits de la propriété intellectuelle. Nous le faisons dans le cadre d'un plan d'action qui prévoit la mise en œuvre de contrôles documentaires et physiques, à l'arrivée des marchandises sur le territoire, et par l'exploitation de renseignements. Notre action se prolonge à l'intérieur du territoire par la mise en œuvre de visites en entreprise ou de visites domiciliaires suite à la flagrance ou sur ordonnance dans le cadre d'enquêtes approfondies. Le territoire n'échappe pas à ce fléau qui est source de profits illégaux. Pour autant, l'année 2022 a été marquée par une baisse des importations en provenance de Chine, pays exportateur de produits contrefaits.

    Peut-on dire que les douanes représentent un sas de sécurité ?

    Nous sommes un premier rempart qui permet d'endiguer les trafics illicites, des produits stupéfiants à la contrebande d'alcool, de tabac et de cigarettes en passant par les trafics d'armes et de munitions, la protection des espèces animales et végétales ou le respect des normes. Notre présence sur la frontière, notre culture du renseignement et l'expertise de mes collègues facilitent la détection des marchandises de fraude et l'identification des personnes qui les font entrer. Notre objectif vise à servir et protéger nos concitoyens des risques qui les menacent. Nous avons la chance de vivre sur un territoire qui est relativement préservé et entendons le rester.

    Quel est le montant du redressement des droits et taxes opéré par la douane en 2022 ?

    La douane en Nouvelle-Calédonie collecte environ 30 % des recettes du territoire. À ce titre, nous avons une responsabilité forte qui vise à garantir la bonne liquidation des droits et taxes qui sont dus. Dans ce cadre, la lutte contre la fraude à la fiscalité douanière constitue un véritable enjeu. Les fonctionnaires des douanes des bureaux de Tontouta fret et de Nouméa port veillent quotidiennement à la sincérité des déclarations qui leur sont présentées. Par suite, notre service d'enquête complète le dispositif par la conduite d'investigations approfondies. Le montant des droits et taxes ainsi redressés pour 2022 s'élève à 205 millions de francs.

    Comment la combattre plus efficacement ? Est-ce que vous vous intéressez à la navigation de plaisance ou à l'aviation d'affaires qui pourraient être tentées de rejoindre des zones aux fiscalités avantageuses pour la sortie d'avoirs non déclarés ?

    Pour combattre plus efficacement les trafics et les fraudes, nous entendons poursuivre la transformation qui consiste à alléger le contrôle des entreprises qui font du commerce régulier via la mise en place de procédures adaptées pour concentrer notre action sur les trafiquants. Le mouvement des sommes, titres et valeurs fait l'objet d'une attention toute particulière pour les raisons que vous invoquez, à savoir : la proximité de pays ou territoires connus pour faciliter les opérations de blanchiment. L'argent liquide qui quitte le territoire est souvent la contrepartie de la fraude fiscale et de tous les trafics que je viens de mentionner.

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