- Baptiste Gouret | Crée le 12.09.2025 à 12h02 | Mis à jour le 22.09.2025 à 10h17ImprimerPlusieurs projets de démolition du parc social sont envisagés, comme à Pierre-Lenquette, dans le cadre de la nouvelle stratégie provinciale du logement et de l’habitat. Photo Archives LNC/Joanna JullienLes quartiers sociaux ont concentré une grande partie des violences survenues en mai 2024. L’exécutif provincial veut en tirer les leçons, à travers une nouvelle stratégie de l’habitat basée sur la destruction d’une partie du parc social au profit de logements "intermédiaires", le relogement de familles et la résorption des squats. Une tentative "d’exclure les plus précaires de la ville" et de punir ceux jugés responsables de la crise, s’inquiète l’opposition.
En 2022, la province Sud a adopté un plan fixant les grandes orientations de l’habitat et du logement pour les dix années à venir. C’était sans compter l’explosion, en mai 2024, des violences dans les quartiers populaires du Grand Nouméa, où s’est concentrée la colère d’une jeunesse kanak précarisée. Les émeutes ont "bouleversé les équilibres sociaux et urbains dans l’agglomération", juge aujourd’hui la province Sud, qui estime nécessaire de réviser sa politique menée dans ces zones défavorisées. Jeudi 11 septembre, en assemblée de province, l’exécutif a soumis aux élus une délibération visant à adapter sa stratégie en matière de logement et d’habitat.
Les orientations qui y sont déclinées traduisent une volonté claire de limiter au maximum le logement social, vu comme une poudrière susceptible de redevenir le théâtre de violences similaires à celles de l’année dernière. Les responsables de la Maison bleue ne s’en cachent pas. "Ce qui s’est passé pendant les émeutes nous a alertés sur une situation qu’on connaissait déjà", admet Sonia Backès, présidente de la province Sud. À cette inquiétude s’ajoute une réalité : la demande de logement social connaît une baisse historique, estimée à 33 %. En parallèle, les bailleurs sociaux, déjà fragilisés, sont confrontés à une explosion des impayés, alors que les commerces détruits durant l’insurrection deviennent progressivement des lieux de squats.
Démolitions à Tindu, Pierre-Lenquette et Saint-Quentin
La nouvelle stratégie provinciale prévoit, en priorité, de mettre un terme définitif à la construction de logements sociaux. "On ne peut pas continuer, il y a trop de logements vacants", estime Sonia Backès. En Nouvelle-Calédonie, 3 000 habitations seraient actuellement inoccupées. Une perte de recettes considérable pour les bailleurs sociaux. Mais la province Sud envisage d’aller encore plus loin en "diminuant la densité du parc social". Autrement dit : détruire certains grands ensembles dans les quartiers où ce type d’habitat est "surreprésenté", afin de "rééquilibrer l’offre résidentielle".
"On a vu que cette densité importante de logements sociaux avait sans doute contribué à la dégradation du climat social et donc aux émeutes de mai dernier", insiste la présidente de la province Sud. Plusieurs secteurs ont déjà été identifiés : Saint-Quentin, où trois tours doivent encore être rasées, Tindu, ainsi que Pierre-Lenquette. Soit 356 logements, pour un coût total estimé entre 1,2 et 1,4 milliard de francs. L’État serait prêt à financer 75 % des chantiers de déconstruction de Tindu et Pierre-Lenquette, mais les financements restent à trouver pour Saint-Quentin. Le parc social vacant serait alors utilisé pour reloger les familles vivant dans ces ensembles voués à la destruction, ainsi que celles occupant les squats, dont la résorption est une des grandes orientations de la stratégie provinciale.
Une "politique de désurbanisation ciblée" déjà engagée depuis plusieurs années par les collectivités et les bailleurs sociaux, avec l’objectif assumé de redessiner ces quartiers où se concentrent actuellement les populations les plus pauvres. La construction de logements dits "intermédiaires", en accession à la propriété pour des ménages issus de la classe moyenne, doit justement participer à une forme de mixité sociale recherchée. Autre outil pour réduire le nombre d’occupants du parc social : les inciter à acheter un bien en dehors de l’agglomération, en développant l’accès à des "logements abordables" en Brousse.
Vision politique "punitive"
L’examen de cette nouvelle stratégie, jeudi, a mis en lumière les visions très opposées qui séparent l’exécutif et l’opposition sur la question de l’habitat. Philippe Michel, de Calédonie ensemble, voit dans ce plan la poursuite d’une "politique de représailles contre ceux considérés comme les responsables du 13-Mai", que la province Sud chercherait à déplacer loin de la ville. "On est également très dubitatifs sur notre capacité à réduire la densité de logements sociaux", a souligné l’élu.
Pour Vaimu’a Muliava, de l’Éveil océanien, cette volonté de "déplacer les plus précaires" représente un vrai risque. "Ces gens-là, on les met où ? On les laisse repartir dans les squats ? On les fait quitter la ville, loin du travail et des écoles ? Les loger hors des bassins de vie, c’est les exclure. Ce plan, c’est un travail utile, mais incomplet et surtout déséquilibré", a regretté l’élu, également président du conseil d’administration de la Sic.
Présentée comme "pragmatique", cette stratégie porterait "une vision politique" qualifiée de "punitive". "Les élections arrivent, fait remarquer Vaimu’a Muliava. Les Calédoniens soutiennent-ils cette vision ? La réponse leur revient."
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