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    Société
  • Propos recueillis par Anthony Tejero | Crée le 30.11.2023 à 07h04 | Mis à jour le 30.11.2023 à 12h11
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    Gowe Mahe, sénateur de l’aire Ajië-Arhö et Muneiko Haocas, chargée de la communication du Sénat coutumier, en marge de la Journée orange, organisée mercredi, contre les violences faites aux femmes. Photo A.T.
    Alors que le Sénat coutumier organisait, mercredi, sa Journée orange contre les violences faites aux femmes, la question de voir siéger des sénatrices au sein de l’Institution a-t-elle avancé ? Réponse avec le sénateur Mahe Gowe et Muneiko Haocas, qui planchent sur la manière dont peuvent évoluer les structures coutumières.

    Qu’est-ce que la commission dite " C 8 " sur l’évolution des instances coutumières ?

    Mahe Gowe : Il s’agit d’une commission dédiée à réfléchir sur l’adaptation des structures coutumières face à l’évolution de la société et des institutions de droit républicain en général.

    L’an passé, le Sénat coutumier s’est dit prêt à accueillir des sénatrices. Un sujet sur lequel travaille la commission. Où en est ce dossier ?

    M.G : Les femmes, en général, ne sont pas interdites dans les espaces coutumiers. Elles ont complètement leur place et leur rôle à jouer dans la sphère coutumière. Mais pour arriver au poste de sénatrice coutumière il y a tout ce chemin à parcourir à partir du niveau local : à partir des chefs de clan, des familles et ensuite au niveau tribu tribal ; puis au niveau du district coutumier et ensuite de l’aire coutumière pour parvenir à l’espace du Sénat coutumier. Les femmes sont donc complètement libres de se positionner comme sénatrices coutumières.

    Pour autant, est-ce que le Sénat coutumier peut être porteur de réformes pour donner plus de chances aux femmes d’accéder à ces fonctions, notamment en faisant évoluer ce mode de désignation des sénateurs ?

    M.G : L’idée sur laquelle nous travaillons, en effet, c’est de passer d’un mode " us et coutumes " à un mode de désignation via des électeurs.

    Qui seraient ces électeurs ?

    M.G : Les grands électeurs seraient principalement les représentants coutumiers : les chefs de clan, les présidents des conseils de chefs de clan, les chefs et grands chefs.

    Muneiko Haocas : Ce qui est intéressant dans la dynamique actuelle du Sénat coutumier, c’est qu’il plante le décor et fait le bilan des 30 dernières années afin de pouvoir évoluer avec les nouvelles données de la société où la femme a toute sa place. C’est d’ailleurs le cas depuis toujours car cette place est reconnue dans la culture kanak. Les sénateurs veulent donc la donner aussi au sein de cette institution. Et ce, par les implications nouvelles qui seraient de nouveaux modes de désignation par voie élective via les grands les grands électeurs par aire coutumière.

    Cela sera d’abord vu au niveau local bien évidemment. Or aujourd’hui, il existe des femmes cheffes de clan dans l’aire Hoot ma Waap par exemple. L’idée, c’est que demain rien n’empêche qu’une femme accède à la candidature de sénatrice coutumière et puisse porter toutes ces problématiques auxquelles nous faisons face dans le pays. Ces candidatures seraient étudiées selon des critères objectifs, rationnels.

    En quoi cette évolution vous semble-t-elle essentielle ?

    M.H : Cela pose les bases de la manière dont la société kanak se positionne vis-à-vis de l’évolution tout en gardant ses us et coutumes. C’est un cheminement nouveau qui permet de préserver nos traditions. Le message est clair : la femme a toute sa place dans la société. Elle doit participer à la fois dans le diagnostic, mais également dans les propositions de solutions qui définiront la feuille de route de demain du Sénat coutumier.

    Une autre problématique concerne la difficulté d’éloigner un conjoint violent de la tribu pour permettre à la femme de rester sur place en sécurité. Comment analysez-vous ces situations ?

    M.G : Il y a un mariage coutumier avec un discours coutumier qui l’encadre, mais face à l’évolution de la société et aux nouveaux comportements, c’est une situation qu’on découvre et qu’on essaie de faire évoluer. Chaque situation et chaque aire coutumière présentent une situation particulière. Chez nous par exemple, au sein de l’aire Ajië-Arhö, les femmes conservent leurs droits, là où elles sont.

    MH : Le Sénat travaille actuellement sur ce cas particulier parce qu’il est conscient de la problématique. Sur Nouméa par exemple, le juge va décider que le père ne vit plus dans le même lieu que la femme, et donc parte du foyer. Par contre, dans nos aires, dans nos tribus, c’est plus compliqué. L’homme peut revenir le soir pour voir sa femme parce qu’il est chez lui, le foncier lui étant rattaché au niveau du patronyme. Cela fait partie des comportements et de l’évolution de la société à prendre en compte. Plus de 50 % des violences à l’égard des femmes sont commises dans nos aires. Globalement, la Nouvelle-Calédonie est d’ailleurs bien au-dessus du niveau national. Sur ce point où l’homme reste dans le lieu de vie du foyer, il faut peut-être évoluer au niveau du droit coutumier. Aujourd’hui, nous avons un Sénat qui se renouvelle, qui s’alimente de forces vives. L’institution fait d’ailleurs appel à elles, que ce soient des juristes et autres, pour venir participer à ces réflexions.

    M.G : La difficulté, c'est le chevauchement des deux droits : un droit kanak autochtone, qui défend un collectif ; et un droit commun républicain axé sur la personne individuelle. Ce n’est pas évident et on s’attache à donner des réponses. Les travaux de la C8, dont nous effectuons une restitution chaque année, ont pour rôle de porter la réflexion sur l’évolution de la société et la manière dont ces deux droits peuvent cohabiter et non pas être en confrontation.

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