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    Nouvelle Calédonie
  • Anne-Claire Pophillat | Crée le 12.09.2025 à 05h00 | Mis à jour le 22.09.2025 à 10h18
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    Après la nomination de Sébastien Lecornu en tant que Premier ministre, Sonia Backès estime qu’il faudrait que Manuel Valls reste ministre des Outre-mer, afin de maintenir "un équilibre, si on veut que les choses progressent sans être en confrontation". Photo A.-C.P.
    De retour de Paris, la cheffe de file des loyalistes se dit rassurée quant aux soutiens du Premier ministre, Sébastien Lecornu, et des différents partis politiques à l’accord de Bougival, exceptée La France insoumise. Le calendrier doit se poursuivre, affirme Sonia Backès, qui estime qu’il faut trouver des solutions "pour que le FLNKS revienne dans le jeu". La présidente de la province Sud se satisfait également de l’adoption en assemblée, jeudi, d’une aide à la sécurisation des logements ainsi que d’une nouvelle stratégie provinciale du logement social. En toile de fond, les élections municipales et provinciales en 2026. Entretien.

    Lors de l’assemblée de province jeudi 11 septembre, vous avez proposé la création d’un dispositif d’aide à la sécurisation des habitations pour les particuliers qui sont propriétaires. Pourquoi ?

    Il y a plus de 33 % d’atteintes aux biens sur les deux dernières années. On a un effet 13-Mai évident, et ça concerne toutes les communes. Il y a une vraie attente d’une réponse par rapport à ça. La province n’a beaucoup d’outils, mais la question de la sécurisation des particuliers est une réponse qu’on peut apporter.

    Vous avez également adopté une nouvelle stratégie provinciale de l’habitat. En quoi va-t-elle consister ?

    Ce plan a été validé par les quatre communes de l’agglomération et la province. Il y a un constat d’échec de la politique du logement social depuis quinze ans. Construire mille logements sociaux par an pour résorber les squats n’a pas fonctionné. On a généré un flux qui ne s’est pas résorbé, au contraire. On est passé de 66 à 74 % de la population qui habite dans le Sud. Au final, on a mis les gens des squats dans des logements sociaux et les gens du Nord et des Îles qui arrivaient dans les squats. Et on a fait des zones de logements sociaux très denses dans certains endroits, comme à Dumbéa, Tuband… La densité est trop importante si on veut réussir à avoir une qualité de vie, une capacité à sécuriser ces zones.

    On ne dit pas qu’il faut abandonner les gens qui n’ont pas d’argent, mais à un moment donné, on est obligé de faire des choix.

    On a 3 000 logements vacants, donc il n’est plus question d’en construire, tout le monde est d’accord là-dessus. On a identifié trois zones à dédensifier, Saint-Quentin, Pierre-Lenquête et Tindu, pour lesquelles on a l’accord du bailleur social pour supprimer un certain nombre de bâtiments pour avoir un peu plus d’air et construire le cas échéant des lieux de vie plus espacés. Je voudrais le faire à Tuband, mais pour l’instant la SIC bloque. On a 7 zones, on pourrait en garder 3, 4 sur du logement social pur et faire évoluer sur du logement pour les personnes âgées non médicalisées, pour les étudiants ou les jeunes travailleurs. On identifie des publics spécifiques pour essayer d’apporter des réponses aux personnes victimes de violences conjugales, à celles en situation de handicap, aux nouveaux travailleurs pauvres, aux gens victimes d’accidents de la vie ou du 13-Mai. On ne peut pas saturer les zones d’urbanisation et là où il y a de l’emploi avec des gens qui ne travaillent pas. On veut prioriser les endroits proches des bassins d’emploi pour les gens qui travaillent et éloigner un peu plus ceux qui ne travaillent pas. Plus de 90 % du logement social est en province Sud, nous sommes prêts à accompagner financièrement la construction de logement social en province Nord et des Îles.

    Vous parlez de logement social, avant cela, la province a supprimé ou restreint les conditions d’accès à certaines aides (bourses, aide médicale, etc.). Une partie de l’opposition, l’Éveil océanien et Calédonie ensemble, vous accuse depuis les émeutes de mener une politique antisociale, punitive envers un certain public. Que répondez-vous ?

    Je réponds que c’est un mensonge. La question des expulsions des logements par exemple, c’est la démarche exclusive des bailleurs sociaux. C’est le bailleur social qui, une fois que les impayés sont trop importants, entame une procédure d’expulsion.

    Et plus globalement, il n’y a plus d’argent. On a aussi arrêté une grande partie des aides aux agriculteurs, on a baissé notre masse salariale de 15 % et notre montant de subventions de 15 %. Et puis, il y a une vraie volonté de dire que la politique d’assistanat qui a été menée a échoué. Je ne crois pas qu’on aide les gens quand on leur fait payer 10 000 francs un logement. Ce n’est pas le coût de la vie. Il y a un besoin de responsabilisation de la population. On ne peut pas vivre sur le système, on n’a plus les moyens de faire ça. On ne dit pas qu’il faut abandonner les gens qui n’ont pas d’argent, mais à un moment donné, on est obligé de faire des choix. Si on veut continuer à aider les populations qui en ont besoin, comme on ne peut pas aider tout le monde, on a par exemple instauré un critère des 10 ans de résidence sur le logement social. Ce n’est pas punitif, c’est comment aider quand on n’a plus d’argent, comment on fait pour que ça fonctionne ?

    Sans le prêt de l’État, on serait en faillite.

    Depuis peu, l’ensemble des dispensaires de la province Sud, notamment ceux de Thio et Yaté sont pourvus de médecins. Est-ce que cela peut être pérennisé ?

    Ça nous coûte très cher de mettre un médecin à Thio, à Yaté et à l’Île des Pins. Ça aussi, c’est un choix fait par la province et qui n’est pas forcément fait de la même manière par les autres collectivités. Pour attirer les médecins, il faut les payer. Donc on paie les billets d’avion, le logement, l’installation, le déménagement. C’est la seule solution. Ça et la sécurité. On a vu les populations des communes, qui maintenant nous accompagnent sur la sécurisation. Mais on a été très clairs, si nos personnels de santé sont en danger, on les enlèvera.

    Manuel Valls a annoncé, avant la chute du gouvernement, le versement de la deuxième tranche du prêt AFD. Quelle part revient à la province ?

    Ce qui revient aux provinces, c’est ce qui permet de compenser la perte de recettes fiscales. On avait 112 milliards de recettes fiscales avant la crise. On s’est mis d’accord sur le fait de descendre à 102 milliards, mais la réalité, c’est qu’on ne produit que 87 ou 88 milliards de recettes. Donc la compensation entre les recettes fiscales réellement générées et l’assiette de répartition, c’est le prêt de l’État qui nous l’amène. Sans cela, on serait en faillite.

    Avez-vous déjà une vision du budget 2026 ?

    On construit notre budget sur cet équilibre. Ce qu’on ne sait pas, c’est quelle part du prêt ça va mobiliser. Est-ce qu’on va générer les 88 milliards de recettes ? Parce que si c’est moins, ça veut dire qu’on va dépenser le prêt plus vite qu’on est censé le faire. J’ai toujours l’espoir. J’entends le frémissement économique du redémarrage des prêts immobiliers, de la TGC… Il y a quand même eu un regain d’espoir après Bougival et un léger redémarrage. Après, pour le contenu, la philosophie reste la même. Réduire au maximum les dépenses de fonctionnement, notre masse salariale, de manière à garder une énorme part pour l’investissement.

    J’ai vu tout le monde sauf La France insoumise, et tout le monde soutient Bougival. […] La première question était de savoir si le gouvernement continuerait de le soutenir, et le Premier ministre le soutient.

    D’importants scrutins vont se tenir l’année prochaine, dont les municipales en mars. Comment vont s’organiser les Loyalistes ?

    On essaie de faire des listes d’union dans le plus de communes possibles, je pense qu’on va y arriver dans la plupart des communes. Après, il y en a dans lesquelles il y aura une concurrence au premier tour et on se retrouvera au deuxième. Au Mont-Dore, c’est compliqué, c’est difficile de le régler autrement que par le meilleur gagne, je ne vois pas bien comment on évite la concurrence entre Elizabeth Rivière et Nina Julié. Mais, on va arriver à ce que ça n’ait pas d’impact. On est très unis sur les questions de l’avenir institutionnel, Bougival, les provinces, etc.

    L’union se fera également pour les provinciales ? Où en sont les discussions ?

    On n’est pas encore là-dedans, parce qu’entre-temps il y aura Bougival et les municipales. Chaque chose en son temps. Ce qui est certain, c’est qu’on considère que la situation de la Nouvelle-Calédonie nous oblige à l’union. Évidemment, ce sont des sujets qu’on aborde tous ensemble, Rassemblement et Loyalistes.

    Vous rentrez de Paris. Qui avez-vous rencontré ? Et êtes-vous confiante pour la suite concernant l’accord de Bougival ?

    J’étais un peu inquiète, je ne savais pas trop quel était l’état des forces en présence à Paris. Le vote de confiance est arrivé. C’est important de bien caler les choses avant qu’on reparte. La proposition de loi organique sur le report des élections est censée passer au Sénat le 23 septembre s’il y a un gouvernement. Derrière, le projet de loi constitutionnelle doit passer au Conseil des ministres le 17 s’il y en a un, sinon le 24 septembre. J’ai vu tout le monde sauf La France insoumise, et tout le monde soutient Bougival. Le Rassemblement national n’est pas contre. Ils disent qu’ils vont être vigilants sur la rédaction qui sera proposée. La première question était de savoir si le gouvernement continuerait de le soutenir, et le Premier ministre soutient, il n’y a pas de difficultés.

    Pensez-vous que le texte sera voté par le Parlement ?

    Je pense qu’il faut que Manuel Valls reste ministre des Outre-mer, parce qu’il faut qu’il aille au bout. Il mesure la difficulté des équilibres. Il sait comment on en est arrivé là. Et c’est l’intérêt, au-delà de Bougival, de la Nouvelle-Calédonie. On voit bien que Lecornu, c’est un ami, mais ça a fait bondir les indépendantistes. Il faut un équilibre si on veut que les choses progressent sans être en confrontation, donc ce serait mieux que Manuel Valls reste.

    Personne n’est opposé au fait d’essayer de trouver des solutions pour qu’ils reviennent dans le jeu. Le problème, c’est qui décide au FLNKS ?

    Vous parlez de confrontation. Continuer le calendrier de Bougival sans le FLNKS, est-ce tenable ?

    L’idée n’est pas de faire sans le FLNKS. Tout le monde les voit, on a vu une partie des nouveaux discuteurs. Personne n’est opposé au fait d’essayer de trouver des solutions pour qu’ils reviennent dans le jeu. Le problème, c’est qui décide au FLNKS, on fait avec qui ? Imaginons qu’on se mette d’accord avec les nouveaux, qu’on trouve un compromis qui ajuste des choses, et puis ils se font sanctionner par d’autres qui ne sont pas contents, parce que ceux qui décident aujourd’hui, ils veulent Kanaky au 24 septembre 2025. Si les gens qui sont là dans le BP du FLNKS et qui ont fait 2 % aux élections, si ce sont eux qui décident et que le plan c’est à quelle date on fait Kanaky, ça n’arrivera pas. Ce qu’on leur a dit, c’est d’abord de régler leurs problèmes internes. Personne ne peut avoir 100 % de ce qu’il veut.

    Je suis convaincue de deux choses. Un, il y a aujourd’hui au sein des indépendantistes deux lignes qui n’étaient pas aussi visibles avant. Une ligne développée par l’UNI, qui est de dire on veut l’indépendance mais avec tout le monde, et une ligne d’une partie extrême du FLNKS, qui veut faire l’indépendance en nous faisant dégager par la théorie du chaos pour être majoritaires et faire l’indépendance. Et puis, il y a une partie au milieu qui ne sait pas trop où elle va. Ma deuxième conviction est qu’il y a une partie des indépendantistes qui ne veut pas d’accord, parce qu’un accord ça fait rester les gens. Il ne faut pas cacher cette réalité.

    Et faire des élections en 2025, comme le demande aujourd’hui le FLNKS ?

    Oui, mais le problème c’est qu’on n’a pas de corps électoral. Le corps électoral actuel aurait été attaqué, et on avait des chances de gagner, donc on aurait fait les élections qui, un an après, auraient été annulées. Donc, oui, ce mandat est trop long, il faut aller aux élections. Le problème, c’est comment on règle le corps électoral ? Soit on le réglait à part, c’est ce que Darmanin a essayé avec le succès qu’on connaît, soit avec un accord global. On en trouve un, mais ça ne va pas non plus. Après, est-ce qu’il faudrait que finalement, on enlève de la loi constitutionnelle tout ce qui ne concerne pas purement et simplement le référendum et qu’on fasse que le référendum d’abord pour au moins mesurer qui est pour, qui est contre Bougival, et puis le reste, on le fait après ? C’est peut-être une solution de repli pour ne pas braquer, je ne suis pas fermée, mais aller aux élections… En plus, le conseil constitutionnel va rendre son délibéré sur la QPC, Question prioritaire de constitutionnalité, le 19 septembre. Le seul moyen, c’est de passer par un accord global.

    Et si le Parlement ne votait pas Bougival ?

    On reviendrait à la situation ainsi créée. Les gens qui vont refuser au Parlement de voter ça, ils n’ont qu’à trouver une solution, parce que c’est facile de dire que ce n’est pas bien, mais si ça ne va pas, c’est quoi le plan B ? On va continuer à voir crever la Nouvelle-Calédonie à petit feu.

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