- Baptiste Gouret | Crée le 19.04.2025 à 17h18 | Mis à jour le 28.04.2025 à 10h57ImprimerUn projet de loi portant sur diverses dispositions fiscales a entraîné des débats houleux au Congrès, à la suite du dépôt de nombreux amendements par le groupe Calédonie ensemble. Photo Baptiste GouretLes élus du boulevard Vauban étaient réunis en séance, vendredi 18 avril, pour examiner une loi de pays visant à ajuster certaines dispositions fiscales. Un texte largement amendé par le groupe Calédonie ensemble, qui a tenté d’y introduire des mesures d’exonérations fiscales et la prolongation des protections de marché, suscitant de vifs débats dans l’hémicycle et dévoilant les divergences de points de vue sur la manière de relancer l’économie calédonienne.
Extension du dispositif de prêt à taux zéro, modification du tarif des centimes additionnels, création d’une sanction pour défaut de paiement… Le projet de loi du pays "portant diverses dispositions d’ordre fiscal", examiné par les membres du Congrès vendredi 18 avril, se voulait avant tout un texte très technique visant à moderniser et à simplifier le système fiscal calédonien. À l’arrivée, la séance a surtout révélé l’ampleur des désaccords entre les différentes formations politiques sur la stratégie à adopter pour sortir la Nouvelle-Calédonie du marasme économique dans laquelle elle est plongée depuis bientôt un an, et la survenue des émeutes.
Des exonérations qui inquiètent
Les débats ont notamment porté sur les différents amendements déposés par le groupe Calédonie ensemble, qui a vu dans ce texte la parfaite occasion pour instaurer des mesures d’incitation et d’exonération fiscale dans l’espoir de relancer l’économie calédonienne. La formation emmenée par Philippe Michel a par exemple proposé une déduction d’impôts pour les particuliers en capacité d’investir dans les entreprises, ainsi que la possibilité pour les entreprises bénéficiant d’une régulation de marché et dont l’outil de production a été détruit durant les émeutes, telles que Le Froid et Biscochoc, d’être exonérées de taxes à l’importation, le temps qu’elles reconstruisent.
Deux amendements adoptés par l’hémicycle, pour lesquels certains élus se sont toutefois interrogés : ces mesures ne sont-elles pas opposées aux termes de la convention signée par le président Ponga avec l’État pour un prêt garanti de 119 milliards, qui impose à la Nouvelle-Calédonie de ne pas introduire d’exonérations fiscales ? "Ce qui est prévu avec l’État est que, globalement, nous ne devons pas prendre des mesures qui entraînent des pertes de recettes fiscales. Mais si la mesure permet de relancer l’économie et de retrouver davantage de recettes à terme, c’est possible", a précisé Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de l’économie.
La prolongation des protections de marché adoptée
Mais c’est bien sur le dossier brûlant des protections de marché que les débats se sont enflammés. Toujours porté par Calédonie ensemble, un amendement suggérait aux élus d’étendre leur durée, fixée début 2019 à 60 mois, soit cinq ans. Une majorité d’entre elles sont désormais expirées. Problème, selon Calédonie ensemble : une multitude de facteurs (Covid, refondation de la DAE, émeutes…) "n’ont pas permis tant aux bénéficiaires des mesures qu’au gouvernement d’opérer" les renouvellements. Résultat : 80 % des protections de marché ne seraient actuellement plus valides, assure la formation politique. Cela représenterait plusieurs centaines d’entreprises et environ 2 000 emplois. Le groupe Calédonie ensemble a ainsi proposé aux membres du Congrès de prolonger de 26 mois la durée des protections de marché, avec effet rétroactif à février 2024 "afin de donner une base légale aux protections de marché tombées depuis lors".
"Le gouvernement y est totalement défavorable", a rapidement annoncé Christopher Gygès. Pour le membre de l’exécutif, il y a sur cette disposition un "risque de remise en cause de la convention signée avec l’État". En effet, l’État a conditionné le soutien financier de la Nouvelle-Calédonie à une interdiction de prolonger au-delà de 12 mois les protections de marché existantes. L’autorisation de nouvelles protections de marché ne sera possible qu’au terme de l’audit lancé le 11 avril par le gouvernement et visant à évaluer l’efficacité de ce dispositif très critiqué. Christopher Gygès a invoqué "la prudence", rappelant que la Nouvelle-Calédonie avait perdu 9 milliards en provenance de l’État après avoir refusé de réformer la TGC. L’amendement a néanmoins été adopté à une large majorité, soutenu par les indépendantistes et l’Éveil océanien.
"Cavaliers législatifs"
Calédonie ensemble a, pour finir, tenter de faire adopter un dernier amendement visant à exonérer d’impôt sur le revenu pendant trois ans les professionnels de santé installés dans les zones les plus touchées par la pénurie de soignants (Brousse, îles, Yaté). "On n’a pas l’impact financier de cette mesure, le membre du gouvernement est parti, ce sont des conditions de travail inacceptables", s’est emportée Ithupane Tiéoué, du groupe Union pour l’indépendance. "Si je partage l’objectif, je me demande s’il ne faut pas revoir cette disposition, ça nous paraît un peu excessif en l’état", a abondé Milakulo Tukumuli (Éveil océanien). La mesure a été rejetée à une majorité d’élus.
"La séance a été émaillée de dépôts d’amendements qui nous amènent sur un texte qui dépasse le cadre de ce que nous examinons aujourd’hui", s’est agacé Philippe Blaise (intergroupe Les Loyalistes), qualifiant les tentatives de Calédonie ensemble de "cavalier législatifs", des mesures introduites par amendement sans lien avec le texte examiné. L’élu s’en est surtout pris à la prolongation des protections de marché, qui représente selon lui "un message contraire à ce qui est demandé par l’État sur la vie chère" en Nouvelle-Calédonie. "Ce n’est pas ce qui était prévu, nous ne souhaitons pas jouer avec le feu", a souligné Philippe Blaise, dont le groupe a voté contre le projet de loi du pays.
Celui-ci a finalement été adopté à 38 voix pour et 10 contre.
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