- Anthony Tejero | Crée le 11.03.2025 à 18h11 | Mis à jour le 26.03.2025 à 15h22ImprimerLe nombre d’atteintes aux biens a explosé en 2024 en Nouvelle-Calédonie, en grande partie du fait des émeutes de mai 2024. Photo Archives LNC/Anthony TejeroC’était attendu. Les chiffres de la délinquance en Nouvelle-Calédonie se sont envolés l’an dernier, conséquence directe des émeutes et des mois de vives tensions qui ont suivi. Parmi les hausses les plus spectaculaires, les atteintes aux biens dont les destructions et cambriolages qui atteignent des sommets, mais aussi les agressions, avec notamment plus d’un millier de forces de l’ordre pris pour cible en 2024. Face à ce déchaînement "inouï" de violence, les autorités ont confirmé, ce mardi 11 mars, le maintien a minima de 1 500 gendarmes en renfort tout au long de l’année dans le pays.
Les atteintes aux biens et aux personnes bondissent
Sans surprise, les chiffres de la délinquance 2024 "ne sont pas bons" tant en zone police qu’en zone gendarmerie, sous "l’effet" des émeutes et des longs mois de violences accrues qui ont suivi.
Dans ce contexte, les atteintes aux biens bondissent globalement de 33,6 %. C’est particulièrement le cas des dégradations, qui affichent une hausse de 92,4 % ainsi que des cambriolages qui augmentent de 71,8 % par rapport à 2023. Si ces derniers ont majoritairement concerné des locaux commerciaux, professionnels ou associatifs, la tendance est également à la hausse dans les résidences principales et secondaires (respectivement de + 27,7 % et + 45,7 %).
Les vols de véhicules ont quant à eux progressé d’un tiers (+ 32,9 %), un phénomène accru par la série de car-jackings survenus sur la RP1 vers Saint-Louis. Par ailleurs, en raison de l’utilisation de nombreux véhicules brûlés pour être érigés en barricades, "rendant toute constatation impossible", le taux de résolution de ces affaires recule.
Il est à noter que la part des mineurs impliqués dans ces atteintes aux biens qui s’élève à 27,6 % à l’échelle du pays, explose à Nouméa pour atteindre près de 40 % des affaires.
Les affrontements survenus durant les émeutes expliquent en grande partie la hausse globale des atteintes aux personnes. Ainsi en zone gendarmerie, près de 600 militaires ont été blessés et au total plus d’un millier "d’agents de la force publique" ont été la cible de violences (contre 339 en 2023) qui ont, directement et indirectement, causé la mort de deux gendarmes. Un chiffre à mettre en parallèle avec les douze autres victimes civiles de la crise insurrectionnelle.
"Une violence inouïe", selon l’Etat, dont le point d’orgue se situe dans le secteur de Saint-Louis où près de 350 coups de feu dont 150 "touchants" (sur les véhicules ainsi que les militaires) ont été recensés à l’encontre des forces de l’ordre.
À Nouméa, une centaine de policiers ont quant à eux été blessés, dont trois gravement.
Les violences conjugales en recul, une baisse "en trompe-l’œil"
L’un des rares signaux positifs de ce bilan 2024 concerne les violences sexuelles, conjugales et intrafamiliales qui sont en recul respectivement de 19 %, de 22,5 % et de 18,6 % en 2024 et plus particulièrement à partir de mai. Mais cela n’implique pas pour autant une diminution de ce fléau. "C’est une baisse en trompe-l’œil", avertit d’emblée Yves Dupas, le procureur de la République, puisque les restrictions de liberté (couvre-feu, etc.) et de circulation liées aux émeutes n’ont pas facilité l’accès et l’accueil des victimes, notamment dans les commissariats et les brigades de gendarmerie.
Une délinquance focalisée en milieu urbain
Alors qu’elle représente près des deux tiers de la population, Nouméa et son agglomération concentrent plus de trois quarts des actes de délinquance du pays qui demeurent un "phénomène localisé et urbain", souvent sur fond d’alcool et de cannabis.
Si cette délinquance se focalise sur le Grand Nouméa donc, le commandant de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie met en garde contre une hausse notable de ces faits dans certains secteurs comme Koné ou Maré : "Un phénomène nouveau, sans doute lié à des jeunes qui ont grandi dans l’agglomération et qui ont récemment été envoyés là-bas", analyse le général Nicolas Matteos.
À noter par ailleurs que la délinquance sur internet est également en forte progression, notamment pour le trafic de stupéfiants, avec par exemple une hausse des délits constatés (252) de 56,5 %.
Une délinquance bien plus marquée que dans l’Hexagone
Si le Caillou est épargné par certains phénomènes qui touchent l’Hexagone ainsi que d’autres territoires ultramarins, comme le grand banditisme ou le trafic d’êtres humains, il n’empêche que de nombreux actes sont nettement plus marqués localement. C’est particulièrement le cas pour les violences physiques non crapuleuses, dont le vol n’est pas l’objectif, deux fois plus élevées que dans l’Hexagone (et dont le chiffre ne cesse d’être en hausse depuis 2019 dans le pays).
Sans grande surprise, la Nouvelle-Calédonie a enregistré un taux de destructions par habitants plus de trois fois supérieur à celui de la Métropole.
Quels effectifs de forces de l’ordre en 2025 ?
À Nouméa, des escadrons de gendarmes mobiles viennent en renfort des effectifs de police.Actuellement 20 escadrons de gendarmes mobiles sont en renfort dans le pays, soit environ 1 500 militaires qui s’ajoutent ainsi aux 680 agents de police que compte Nouméa et aux 550 gendarmes habituellement déployés sur le reste du territoire. Au total, les forces de l’ordre représentent plus de 2 700 personnes. Des effectifs qui seront maintenus tout au long de cette année, assure le haut-commissaire.
"Cela m’a été confirmé par les autorités politiques nationales. Et si de nouvelles violences survenaient, j’ai demandé que nous retrouvions au plus vite les effectifs déployés pour le 24 septembre [où 6 000 forces de sécurité étaient mobilisées NDLR]", annonce Louis Le Franc, estimant en cas de "nouveau" 13 mai pouvoir maintenir l’ordre "trois ou quatre jours" avant l’envoi de renforts sur place, dont des "forces spécialisées si besoin". "On est attentifs à tous les signaux faibles qui pourraient mener à de nouveaux troubles de l’ordre public."
En patrouille, à pied et dans les transports en commun
C’est pourquoi, parmi les priorités de la police et de la gendarmerie cette année, est prévue une multiplication des contrôles, mais aussi des agents en patrouille et sur le terrain à la fois pour "rassurer" la population et "dissuader" d’éventuels actes de délinquance.
"Des policiers piétons seront notamment déployés dans certains secteurs de Nouméa, comme au centre-ville ou encore sur les baies, mais nous sécuriseront également les quartiers périphériques, les établissements scolaires ainsi que les transports en commun", annonce le contrôleur général Marjorie Ghizoli, à la tête de la direction territoriale de la police nationale, qui compte bien, dès cette année, réinvestir des locaux de proximité, en particulier à Ducos et à Rivière-Salée, alors que quatre commissariats ont été détruits dans la capitale l’an dernier.
Vers de nouvelles restrictions sur la vente d’alcool ?
Aux lendemains de la rixe qui a éclaté au 1881 et qui a blessé au moins sept personnes, le haut-commissariat annonce étudier un éventuel retour des restrictions sur la vente d’alcool.
Pour l’heure, aucune décision n’a été prise, dans l’attente d’une réunion prévue ce jeudi avec les gérants des établissements de nuit et débits de boissons. Limitation des volumes et horaires de ventes en magasin, interdiction de consommation entre 22 heures et 7 heures dans les bars et discothèques… Rien n’a encore été tranché, mais toutes les options sont sur la table. Un arrêté en ce sens pourrait tomber d’ici ce vendredi et donc s’appliquer dès ce week-end.
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