- Anne-Claire Pophillat | Crée le 17.12.2025 à 05h00 | Mis à jour le 17.12.2025 à 05h00ImprimerSi le Rassemblement est toujours engagé dans l'accord de Bougival, Virginie Ruffenach affirme que le parti est "prêt à discuter". Photo A.-C.P.Sa candidature aux élections municipales à Nouméa, l’abandon de la consultation anticipée, la poursuite des discussions, l’invitation à Paris du président de la République aux élus calédoniens, le plan de refondation proposé par Sébastien Lecornu… Virginie Ruffenach, présidente du groupe Rassemblement au Congrès, fait le point des dossiers d'actualité et affirme avec force que trouver un accord est "indispensable" afin de tenir les élections provinciales avec un corps dégelé. Entretien.
Vous avez annoncé, lors du comité directeur du Rassemblement, lundi 15 décembre, votre candidature aux élections municipales à Nouméa. Pourquoi, et qu'allez-vous porter ?
Il y a besoin d'une énergie nouvelle à Nouméa. En matière de sécurité, il y a un plan Marshall à mettre en place. Ça ne sert à rien d'avoir de magnifiques trottoirs et de ne pas se sentir en sécurité. Il faut revaloriser le salaire des 216 policiers municipaux et redéployer des commissariats de police municipale dans des zones stratégiques. Je pense au marché de Moselle, qui est à proximité du quartier chinois, une source de délinquance majeure aujourd'hui, mais aussi au niveau du rond-point de Magenta et à l'Anse Vata, près de la zone touristique des baies, qui est une zone de délinquance la nuit. Nous proposerons également de mettre en place un couvre-feu pour les moins de 16 ans, de 23 heures à 4 heures.
Il y a aussi le sujet de l'armement. La police municipale peut être armée dans l'Hexagone, mais pas en Nouvelle-Calédonie. Nous devons travailler pour faire en sorte que cette disposition soit étendue au territoire. Enfin, certains commerçants sont victimes de cambriolages réguliers dans plusieurs quartiers de la ville. Nous leur proposerons la mise en place d'un bouton poussoir en contact direct avec la police municipale.
Un autre axe important de votre campagne concerne le développement économique. Que proposez-vous ?
Sous l'empire de cette maire, il y a une gestion pyramidale et isolée, notamment du développement économique de la ville, qui est en train, dans beaucoup de quartiers, de mourir. Et ce n'est pas dû qu'aux émeutes. Le centre-ville dépérit, se vide. Nous aurons un plan dynamique de revalorisation économique pour simplifier les démarches et favoriser les projets. Par exemple sur le front de mer, développer des petites structures de restauration rapide, des curios... Et aussi faciliter la mobilité avec un système de navettes communales, qui pourront transporter les Nouméens de la rue de l'Alma jusqu'aux baies, en passant par le Quartier-Latin et Port Plaisance, afin de mieux desservir le centre-ville et de soutenir ceux qui exercent une activité de commerce.
Au-delà de la gestion de la ville, c'est l'ambiguïté politique de Sonia Lagarde qui nous a convaincus de nous lancer.
Vous reprochez à Sonia Lagarde son ambiguïté politique, c'est-à-dire ?
C'est un point fondamental. Au-delà de la gestion de la ville, c'est l'ambiguïté politique de la maire qui nous a convaincus de nous lancer. Elle se traduit par aucun soutien à Nicolas Metzdorf lors des élections législatives de 2024, aucun soutien aux candidats partisans de la France lors des sénatoriales, ou encore aucun soutien aux combats que nous menons pour dégeler le corps électoral.
Est-ce que les Loyalistes soutiennent votre candidature ?
J'ai entendu la présidente de la province Sud le 5 novembre, lors d'une conférence de presse, indiquer que des discussions étaient en cours pour accompagner la maire sortante. Je suis un peu étonnée de cela, mais c'est ainsi. Le Rassemblement a dirigé la ville de Nouméa sous Jean Lèques pendant 40 ans. J'ai moi-même été élue au conseil municipal. Or, le mouvement en est aujourd'hui exclu, il compte aucun élu, et nous considérons légitime de retrouver une place dans ce conseil, parce que nous portons une vision et une énergie nouvelle dont la commune a besoin. Cette liste sera une liste d'ouverture vers la jeunesse et l'ensemble de la société civile.
Les candidatures du Rassemblement et des Loyalistes ne mettent-elles pas à mal l'unité tant plébiscitée par les non-indépendantistes ?
Ce qu'on constate, c'est qu'au Mont-Dore nous avons un maire, donc si on voulait faire l'unité, il suffisait de le soutenir. Le Rassemblement a le droit d'exister. Nous sommes un parti historique, nous sommes peut-être le seul encore à avoir plus de mille adhérents en Nouvelle-Calédonie, nous portons une voix, une mission. Et nous ne soutiendrons pas la candidature de Sonia Lagarde, qui ne soutient pas les combats des partisans de la France en Nouvelle-Calédonie, qui n'a pas soutenu les voisins vigilants et a radié 5 000 électeurs juste pour des problèmes de mauvaise orthographe des noms ou de virgule mal placée dans l'adresse.
Avant de parler de tête de liste, on a un combat extrêmement important pour ces provinciales, c'est de refuser la tenue d'élections sur un corps électoral gelé, et j'espère bien que l'unité de toute la famille non-indépendantiste sera de mise sur ce sujet.
Pensez-vous, au-delà du Mont-Dore (avec Elizabeth Rivière) et Nouméa, présenter des listes dans d'autres communes ?
Un travail est en cours, nos référents sont sur le terrain pour rassembler les compétences et tous ceux qui ont envie de gérer correctement les communes et leur donner un élan.
Les provinciales sont prévues avant la fin du mois de juin. Est-ce que l'unité se fera à ce moment-là, derrière les deux candidatures évoquées de Sonia Backès dans le Sud et Alcide Ponga dans le Nord, ou est-ce que ce schéma a évolué ?
Avant de parler de tête de liste, on a un combat extrêmement important pour ces provinciales, c'est de refuser la tenue d'élections sur un corps électoral gelé, et j'espère bien que l'unité de toute la famille non-indépendantiste sera de mise sur ce sujet. Avoir des élections sur un corps gelé serait inacceptable. Cela susciterait, à mon avis, le départ de nombreuses personnes qui ne croiraient plus en la Nouvelle-Calédonie, qui penseraient que c'est toujours la ligne la plus dure des indépendantistes qui l'emporte. Cela voudrait dire que ceux et celles qui depuis des dizaines d'années sont investis ici ne peuvent pas choisir leurs représentants locaux, que des enfants nés sur ce territoire ne peuvent pas voter aux provinciales. Il faut absolument une ouverture sous la forme d'un corps glissant. C'est ce que nous avons obtenu dans l'accord de Bougival, avec les 15 ans en 2026, puis les 10 ans en 2031. D'où la nécessité de trouver un accord pour les Calédoniens, c'est indispensable. Et j'engage l'ensemble des partenaires à faire des efforts. Mais nous l'avons dit aux représentants du FLNKS, la solution ne peut pas être la pleine souveraineté, puisque les Calédoniens ont choisi par trois fois non.
Quels efforts êtes-vous prêts à faire dans le cadre des discussions à venir ?
Notre ligne est au sein de la République française, pour le dégel du corps électoral et le rééquilibrage du Congrès, mais nous avons fait des pas conséquents à Bougival. Le Rassemblement a toujours été sur le chemin d'un accord, et nous considérons qu'il est toujours à portée de main, il faut travailler en ce sens. Ça ne peut pas être Bougival ou rien.
Que pensez-vous de l'annonce de l'abandon de la consultation anticipée ?
Aucun d'entre nous n'en a été averti, nous avons été un peu surpris de cette méthode. Le sujet n'a pas été assez anticipé en amont. Si, à Paris, cette proposition avait été un peu plus travaillée avec les groupes politiques, ça aurait évité, en pleine mission des facilitateurs, d'avoir un communiqué des Socialistes indiquant qu'ils sont contre cette consultation anticipée, d'avoir une fronde des maires à qui on n'a pas expliqué la faisabilité d'avoir deux scrutins le même jour, etc. C'est dommage, parce que nous étions attachés à ce qu'on puisse consulter les Calédoniens, qui sont les vrais juges de paix.
Il faut désormais se poser et voir quels sont les équilibres possibles, pour pouvoir proposer aux Calédoniens un accord qui prévoit cette ouverture du corps électoral, qui est incontournable.
La mission de facilitateurs proposait par exemple d'enlever le nom de Bougival. Il y avait des pistes intéressantes qui n'enlevaient ni l'esprit, ni les fondamentaux de cet accord.
Est-ce que cet entêtement et cette impréparation, au-delà de la consultation anticipée, ne nuisent pas à Bougival ?
Nous espérons que non. Nous sommes engagés dans cet accord, toute notre famille politique l'est et considère que c'est un bon accord et le défendra jusqu'au bout. Mais, nous sommes prêts à discuter, les facilitateurs ont fait des propositions que nous trouvions sensées.
Quelles propositions ?
Ils proposaient par exemple d'enlever le nom de Bougival. Il y avait des pistes intéressantes qui n'enlevaient ni l'esprit, ni les fondamentaux de cet accord. Tous ces travaux sont là, ça fait des années qu'on discute, ça ne doit pas être perdu. Ça serait dramatique de ne pas avoir d'accord jusqu'en 2027 et de laisser la Calédonie mourir à petit feu.
Que pensez-vous de l'initiative d'Emmanuel Macron, qui propose aux élus calédoniens de se retrouver à Paris en janvier pour un temps d'échange ?
À la suite au vote du Congrès la semaine dernière, j'avais pris l'initiative de proposer aux groupes un courrier commun, que certains n'ont pas signé, dans lequel nous demandions précisément au Président ce qu'il est en train de faire, c'est-à-dire de reprendre une initiative en associant, et j'espère que ce sera le cas, l'Assemblée nationale et le Sénat, parce que ce sont des acteurs majeurs, c'est par eux que passera le choix final de notre avenir. Il faut reprendre les discussions et mettre toute notre énergie pour offrir des perspectives aux Calédoniens.
Notre famille politique est prête à passer le cap du ressentiment profond et personnel vis-à-vis de certains responsables politiques, à mettre de côté cette colère, dans l'intérêt supérieur des Calédoniens.
Êtes-vous prêts à discuter avec tout le monde, notamment Christian Téin ?
On a toujours dit que c'était compliqué pour nous d'être à côté du leader de la CCAT, à l'origine des dégâts et de la souffrance générés par les émeutes. Aujourd'hui, c'est de l'avenir de la Nouvelle-Calédonie dont on parle, donc il faut que l'ensemble des représentations politiques soient autour de la table. Sinon, nous allons être dans la difficulté, l'ensemble des Calédoniens va l'être. Pour eux, notre famille politique est prête à passer le cap du ressentiment profond et personnel vis-à-vis de certains responsables politiques, à mettre de côté cette colère. Nous sommes prêts à faire des pas comme nous l'avons fait à Bougival, dans l'intérêt supérieur des Calédoniens.
Ce sont les négociations de la dernière chance ?
Absolument, ce sont les négociations de la dernière chance, et je ne veux pas imaginer qu'on sorte avec la convocation d'un corps électoral gelé, contrairement ce à quoi le président de la République s'était engagé en juillet 2023 place des Cocotiers.
Un plan de refondation "fondamental", mais qui ne peut pas être "un solde de tout compte"
"Le plan de refondation proposé par Sébastien Lecornu est fondamental. Mais, le gouvernement collégial a dû demander des clarifications. Par exemple, nous refuserons que ce plan prévoie que dans cinq ans, nous devions nous débrouiller avec les compétences qui nous ont été transférées. Parce que quand on a accepté le transfert de l’enseignement secondaire, c’était parce qu’on avait l’accompagnement de l’État. Sinon, nous ne l’aurions jamais accepté. Il ne peut pas être un solde de tout compte à l’égard de la Nouvelle-Calédonie, en disant, 'on vous donne l’argent, et politiquement c’est terminé, parce que vous n’avez pas été capable de trouver l’accord'. Ce plan ne servira à rien s’il n’est pas porté par une stabilisation politique, ça marche sur deux jambes."
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