- Aurélia Dumté | Crée le 25.12.2025 à 08h00 | Mis à jour le 25.12.2025 à 08h00ImprimerVincent Chevalier est pilote maritime depuis dix ans et président de la jeune association Club Croisière. Photo Aurélia DumtéDu port brésilien de Belém à l’archipel norvégien des Svalbard, en passant par les Caraïbes et les côtes africaines, Vincent Chevalier a écumé les mers avant de revenir sur le Caillou. Aujourd’hui pilote maritime à Nouméa, il veille chaque jour à la sécurité des navires dans les eaux calédoniennes. Portrait.
Vincent Chevalier voulait "voir le monde". De Belém, entrée portuaire du Brésil, aux icebergs du Svalbard, au nord de la Norvège, en passant par les côtes africaines ou encore les Caraïbes, il a été servi. Vincent Chevalier est pilote maritime depuis dix ans, en charge de l’armement au sein du Syndicat professionnel des pilotes maritimes de Nouvelle-Calédonie, et fraîchement président du Club Croisière. "Je n’aurais pas pu rêver mieux."
Les clichés du marin désinvolte, aventurier, sorte de Corto Maltese parcourant le monde, ne sont pas toujours que des clichés. Mais ce n’est pourtant pas cette image d’Épinal de l’aventurier qui a séduit Vincent Chevalier. Le jeune Calédonien sort du lycée sans trop savoir quoi faire. Il suit alors son ami Guillaume Devaux, qui passe un concours pour entrer dans la marine marchande. Guillaume obtient le sésame, Vincent le rate. Pas de souci : il s’engage dans une classe préparatoire à Cancale, un village près de Saint-Malo, à l’école Les Rimains. Son voyage à travers le monde commence, tout comme les longues années d’études et les nombreux milles nautiques qu’il devra parcourir pour atteindre enfin le graal : devenir pilote maritime à Nouméa.
Pilote maritime, un métier très cadré
Le rôle de Vincent et de ses onze confrères est très encadré, avec une forte responsabilité. "Le métier de pilote maritime est réglementé, il existe dans tous les ports du monde. C’est un expert du lieu, ancien capitaine illimité de la marine marchande, qui monte à bord des navires pour les guider et assurer leur accostage en toute sécurité dans les eaux intérieures. Cela permet d’éviter les accidents. Nous connaissons toutes les voies navigables de Nouvelle-Calédonie par cœur", explique le marin. Outre la préservation des voies navigables et des fonds marins, les pilotes maritimes ont un autre rôle : "Nous sommes assermentés. Lorsque nous montons à bord d’un navire, nous avons un ressenti : est-ce que le navire est en bon état de navigabilité ? Si nous estimons que le bateau n’est pas en état, nous le signalons aux Affaires maritimes." Comme Vincent, nombre d’entre eux ont baroudé sur tous les océans, à bord de toutes sortes de navires : bateaux de croisière, cargos, ferries ou bateaux scientifiques.
Écumer les mers du monde
Le jeune Vincent est toujours sur le lagon et a "un attrait pour la mer". Mais devenir marin n’est alors pas une vocation. C’est sa première aventure en Bretagne, en classe préparatoire, qui lui ouvre l’appétit des grands espaces. Il réussit ensuite le concours d’entrée à l’École nationale supérieure de la marine marchande, "L’Hydro" de son surnom, à Marseille. S’ensuivent trois années de théorie et de stages obligatoires. Vincent Chevalier embarque sur des porte-conteneurs de la société Marfret, et accoste dans les ports d’Asie, d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Europe. "J’ai adoré l’ambiance de la Marfret. C’est une petite compagnie familiale avec trois navires. Tu fais quinze jours d’escales en Guyane, puis à Belém. Tu alternes entre le côté speed de l’Europe du Nord – Le Havre, Rouen, Anvers, Rotterdam – et des ports plus exotiques comme Saint-Martin, Trinidad et Tobago… C’est très formateur. " Bien sûr, le jeune Calédonien aurait pu faire ses stages au pays, "mais je voulais voir le monde et me former ailleurs avant de revenir". Puis, Vincent embarque finalement aussi sur le Havannah et le Betico 1. Et il participe à des missions à bord de navires océanographiques dans le Pacifique : "il y a un côté Cousteau qui fait rêver".
"En tant que marin, on fait un peu partie du décor"
Trois années de cours et de voyages à travers le monde plus tard, vient le moment du vrai stage d’officier polyvalent de marine marchande. Il embarque alors pour près de deux ans, avant de retourner une dernière année à l’école. "Mon premier vrai embarquement, c’était à bord d’une ligne tour du monde de la CMA-CGM. On a passé le canal de Panama. J’y ai aussi vécu la plus grosse tempête de ma carrière", raconte le pilote. Des anecdotes, Vincent en a à la pelle : " Sur les bateaux français, j’ai rencontré beaucoup d’Ukrainiens formés par la marine russe, des anciens du KGB, des sous-mariniers… Forcément, il arrive des histoires." Kalachnikovs pointées sur soi, cartouches de cigarettes comme monnaie d’échange, verres de rhum en guise de pacte… " Quand on est marins, on n’est pas perçus comme des touristes, on fait un peu partie du décor. C’est un avantage : ça te permet d’aller dans des endroits différents."

Le quotidien des pilotes maritimes consiste à diriger d’imposants navires dans les eaux intérieures de Nouvelle-Calédonie. Photo A.D.Il se souvient aussi de son passage sur le Club Med II, ces cinq mâts géants qu’il voyait enfant à l’horizon. "Dans le carré officier, il y avait encore des souvenirs de Calédonie. Le commandant avait connu le pays. Nous avons navigué des Caraïbes à la Méditerranée. Sur douze officiers, nous étions huit potes de promo. On a bien rigolé." Deux années de navigation se sont écoulées. Vincent rentre à l’Hydro et passe le fameux diplôme pour devenir Capitaine ou chef mécanicien illimité. Ou presque. "Pour valider ce diplôme, il faut encore cumuler du temps de navigation, obtenir le brevet de capitaine illimité, puis être nommé capitaine sur un navire. "
Des Loyauté au Svalbard, des fjords à la mer de Corail
Il est temps pour Vincent de revenir sur le Caillou. Il entre à la Société de transport des îles (Stiles), sur le Laura 3, en tant que second capitaine, aux côtés de son ami Morgan Penven. Après plus d’un an de navigation dans les Îles Loyauté, il devient capitaine d’armement : "c’est un emploi à terre, de management et de ressources humaines. Une bonne expérience". Cette période est aussi celle de la rencontre avec sa future épouse, Caroline. Mais l’aventure le rattrape : "un ancien collègue m’appelle pour emmener des randonneurs en Norvège, puis au Svalbard, à bord du Polaris". Caroline, alors infirmière, suit une formation pour devenir hôtesse à bord, et voilà le jeune couple d’aventuriers des tropiques partis pour le Grand Nord. Pendant dix mois, le Polaris dépose des randonneurs dans ce décor spectaculaire : "des paysages magnifiques, des aurores boréales… En février, on sortait de la nuit permanente, avec les montagnes enneigées, des Fjords à perte de vue et plus tard durant la saison estivale au Svalbard la rencontre avec les fameux ours polaires."
Le couple revient sous nos latitudes. Vincent embarque sur le Betico. Puis son ami Morgan, alors devenu pilote, lui apprend qu’un concours s’ouvre chez les pilotes maritimes. Trois candidats, une seule place. Pendant un an, Vincent se consacre à la préparation, apprenant chaque fond de carte par cœur. "Ma femme m’a beaucoup soutenu." En 2015, il intègre l’équipe : "nous avons tous les aspects agréables du métier : chaque jour, un lieu différent, un bateau différent, des manœuvres passionnantes. Et, en tant que Calédonien, passer le canal Woodin à bord d’un gros porte-conteneurs quand tu naviguais ici gamin, c’est émouvant. Mais surtout, on travaille pour le pays, en préservant les voies maritimes et en développant le monde nautique."
Pour Vincent, "la marine marchande n’est pas assez promue auprès des jeunes Calédoniens. Cette formation supérieure devrait être mise plus en avant par les centres d’information et d’orientations au lycée". Aujourd’hui, il s’engage aussi comme président du Club Croisière, une association portée par plusieurs organismes, dont le syndicat des pilotes maritimes, pour soutenir et développer le secteur de la croisière dans le pays.
MERCI DE VOUS IDENTIFIER
Vous devez avoir un compte en ligne sur le site des Nouvelles Calédoniennes pour pouvoir acheter du contenu. Veuillez vous connecter.X
J'AI DÉJA UN COMPTEJE N'AI PAS DE COMPTE- Vous n'avez pas encore de compte ?
- Créer un nouveau compte
Vous avez besoin d'aide ? Vous souhaitez vous abonner, mais vous n'avez pas de carte bancaire ?
Prenez contact directement avec le service abonnement au (+687) 27 09 65 ou en envoyant un e-mail au service abonnement. -
-
DANS LA MÊME RUBRIQUE
-
VOS RÉACTIONS




Les transports aériensà consulter ici











